À quelques jours de discussions décisives avec Donald Trump, l'UE est prête à «sortir des sentiers battus» pour mettre fin aux tensions commerciales avec les États-Unis, mais elle se prépare aussi à taxer de nouveaux produits américains en cas d'offensive sur ses voitures.

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, rencontrera le président américain à Washington le 25 juillet avec l'objectif de désamorcer le conflit commercial qui menace de s'aggraver entre Européens et Américains.

Après des droits de douane punitifs imposés en juin sur l'acier et l'aluminium européens, M. Trump se dit désormais prêt à taxer les importations américaines de voitures produites dans l'UE.

«Nous nous rendons là-bas avec les meilleures intentions», dans l'espoir d'«une désescalade», a insisté jeudi la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, qui accompagnera M. Juncker à Washington.

Mais si les États-Unis mettaient à exécution leur menace sur les automobiles, ce qui «serait un désastre» selon elle, l'UE a prévu de riposter.

«Nous sommes en train de préparer avec les États membres une liste de contre-mesures et nous l'avons clairement indiqué à nos partenaires américains», a précisé la commissaire suédoise, à l'image de ce qui avait été fait dans les cas de l'acier et de l'aluminium.

L'UE avait alors préparé une liste de produits américains emblématiques, comme les jeans, les motos Harley-Davidson et le beurre de cacahuète, aujourd'hui lourdement taxés, afin de compenser à hauteur de 2,8 milliards d'euros les dommages causés à son industrie.

Selon une source européenne, la liste de contre-mesures concernant les voitures porte sur un peu moins de 10 milliards d'euros.

Le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, a prévenu jeudi que l'opposition massive aux taxes américaines sur les voitures n'empêchera pas les États-Unis de les imposer si elles sont considérées comme légitimes pour protéger la sécurité nationale.

«Nous continuerons de répondre du tac au tac aux provocations», avait pour sa part prévenu mercredi M. Juncker. «Tous les efforts pour diviser les Européens sont vains», avait-il opiné.

Le Luxembourgeois se rend à Washington sans mandat de négociation au nom des États membres, mais avec l'intention de «sortir des sentiers battus» pour «trouver une solution» avec les Américains, a expliqué Mme Malmström.

«Rhétorique agressive»

L'UE attache beaucoup d'importance à la réforme de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), une institution régulièrement contestée par les États-Unis.

Elle propose en outre de s'attaquer aux problèmes causés par la Chine, avec laquelle les États-Unis sont également engagés dans une guerre commerciale, comme la surcapacité dans le secteur de l'acier ou les transferts forcés de technologies.

Dans le secteur automobile, l'idée d'un accord plurilatéral qui regrouperait les principaux pays producteurs afin de réduire les barrières tarifaires, un temps défendu par l'Allemagne, a également été évoquée.

«Ca vaut peut-être la peine d'être exploré, mais ce n'est pas une solution en soi. C'est une idée parmi d'autres», a admis Mme Malmström.

Autre possibilité: inclure le secteur automobile dans un accord commercial a minima avec les États-Unis sur les biens industriels.

L'UE impose actuellement 10% de droits de douane aux véhicules importés des États-Unis, y compris ceux fabriqués par des constructeurs européens, tandis que les États-Unis taxent à 2,5% les importations de voitures et à 25% celles des camionnettes et camionnettes.

La menace de Donald Trump sur les automobiles inquiète particulièrement l'Allemagne, où ce secteur clé emploie 800 000 personnes.

«Nous avons vu dans le passé que ces réunions étaient imprévisibles», a reconnu jeudi Mme Malmström, fustigeant la «rhétorique de plus en plus agressive» des Américains, qui «sape des décennies de politique étrangère».

Qu'il s'agisse de l'OTAN, de l'accord sur le nucléaire iranien ou du réchauffement climatique, les points de friction sont nombreux avec Donald Trump, qui a récemment estimé que l'UE était un «ennemi» des États-Unis sur le plan commercial.

Il s'est encore insurgé jeudi sur Twitter contre l'amende record de 4,34 milliards d'euros infligée par l'UE au californien Google pour abus de position dominante, martelant qu'il ne tolérerait plus que l'Europe «profite» des États-Unis.

Jean-Claude Juncker a aussi raconté avoir été qualifié de «tueur violent» par l'Américain au cours d'un G7 au Canada, où les États-Unis avaient sabordé le sommet en rejetant une déclaration commune négociée dans la difficulté.

Outre le commerce, M. Juncker et M. Trump doivent aussi parler de politique étrangère, de lutte contre le terrorisme et d'énergie.