Un haut responsable canadien soutient que les États-Unis n'obtiendront pas de traitement de faveur s'ils décident de se joindre à l'Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, que le Canada et 10 autres pays ont signé jeudi.

La signature de cet accord, à Santiago, au Chili, marque l'aboutissement d'une entreprise de sauvetage qui s'était amorcée après le retrait américain d'un accord précédent, le Partenariat transpacifique. Dès son arrivée à la Maison-Blanche, au début de 2017, le président Donald Trump avait annoncé que les États-Unis se retiraient de l'accord conclu par son prédécesseur.

Dans une séance d'information technique destinée aux journalistes, jeudi, un représentant canadien a assuré que les États-Unis n'auraient pas droit à un accès privilégié s'ils décidaient un jour d'intégrer ce nouveau partenariat transpacifique.

Malgré les assauts répétés du président Trump contre cet accord qui n'était pas, selon lui, favorable aux Américains, des membres de son administration ont laissé entendre récemment que Washington envisageait des façons de réintégrer le partenariat. Mais ce ne sera pas chose simple.

L'Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) contient 22 dispositions qui avaient été écartées de l'accord original, auquel adhéraient les États-Unis. Si Washington décidait de revenir, le retrait de ces dispositions devrait être accepté par les onze autres pays signataires. Selon le responsable canadien, les membres actuels du partenariat bénéficient donc d'un rapport de force avantageux pour négocier les termes d'un éventuel retour américain.

C'est le ministre canadien du Commerce international, François-Philippe Champagne, qui a signé jeudi au Chili le PTPGP, au nom du gouvernement. Le nouvel accord donnera au Canada l'accès à un marché de 1,7 milliard de personnes, comptant pour 13 pour cent du produit intérieur brut mondial.

Le Canada a été en mesure d'obtenir des exemptions sur le contenu numérique dans le PTPGP, mais le gouvernement a fait l'objet de fortes critiques de la part de fabricants et de travailleurs du secteur automobile canadien pour avoir signé des ententes parallèles dans cette industrie avec le Japon, l'Australie et la Malaisie.

Le ministre Champagne a soutenu que l'industrie automobile canadienne bénéficiera des réductions de barrières tarifaires prévues par ces ententes parallèles. Ces ententes offrent aussi un mécanisme de règlement des différends avec le Japon, a plaidé M. Champagne.

Maintenant le Mercosur

Le ministre Champagne doit se rendre par ailleurs vendredi au Paraguay pour annoncer le début de négociations formelles dans le but de conclure un accord de libre-échange avec un marché commun de quatre pays de l'Amérique du Sud. Le Mercosur est beaucoup plus petit que le marché transpacifique - 260 millions de consommateurs -, mais un accord de libre-échange offrirait au Canada un accès au Brésil, le premier pays en importance de ce bloc économique qui inclut aussi l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay.

Le porte-parole du ministre Champagne, Joseph Pickerill, a fait valoir que les avancées sur les deux accords constituaient un signal positif d'une réussite des efforts du Canada pour diversifier ses relations commerciales internationales, au coeur d'une grande incertitude avec les États-Unis, son principal partenaire.

Selon M. Pickerill, les pays du Mercosur «sont sensibles à l'approche du Canada dans le secteur du commerce (...) et sont aujourd'hui prêts à conclure un accord beaucoup plus complet que ce qui est était évoqué par le passé».

Mais ce ne sera pas facile non plus, prévient Carlo Dade, spécialiste de l'Amérique latine à la Canada West Foundation. Le Brésil et l'Argentine ont longtemps hésité à discuter de libre-échange avec le Canada, rappelle-t-il. Si le moment semble plus propice, les discussions seront ardues, notamment sur les questions du boeuf et de l'aérospatiale - Embraer, féroce concurrente de Bombardier, est brésilienne.

«Avec l'Argentine, les possibilités peuvent disparaître rapidement, estime M. Dade. C'est comme une "telenovela", qui change chaque semaine. Et cette semaine, le gouvernement veut négocier avec nous.»