L'Arabie saoudite a annoncé lundi son intention de vendre en Bourse une partie du géant pétrolier Aramco et de se doter d'un fonds souverain de 2000 milliards de dollars, le plus grand du monde, dans le cadre d'un vaste plan visant à réduire sa dépendance du pétrole.

Ces annonces ont été faites par le vice-prince héritier Mohammed ben Salmane au moment où le royaume -première économie du monde arabe et premier exportateur de brut- est fortement affecté par la chute des cours.

«Nous pourrons vivre sans le pétrole dès 2020», a assuré le fils du roi Salmane.

Le plan, présenté comme «une feuille de route» pour le développement du royaume durant les 15 prochaines années, est destiné à diversifier l'économie saoudienne qui dépend à plus de 70 % du pétrole au moment où les prix du brut sont en chute libre depuis environ deux ans.

«Nous envisageons de vendre moins de 5 % d'Aramco. La taille d'Aramco est très grande», a souligné le prince Mohammed, en référence à la première compagnie pétrolière au monde. Cela constituerait la plus grosse capitalisation boursière au monde.

«Même en vendant 1 % d'Aramco, ce sera la plus grande introduction en Bourse au monde», a-t-il souligné.

Par ailleurs, a ajouté le prince, «nous envisageons de créer un fonds souverain de 2000 milliards de dollars», dont «les actifs proviendront de la vente d'une petite partie d'Aramco».

Mohammed ben Salmane a affirmé qu'il s'agirait du «plus grand fonds d'investissement au monde, et de loin».

«Vision à l'horizon 2030»

Il détrônera le Fonds souverain norvégien qui pesait lundi matin 866 milliards de dollars, soit près de 2,5 fois moins que le fonds saoudien envisagé.

«Ce fonds va contrôler plus de 10 % de la capacité d'investissement dans le monde (...) et le volume de ses avoirs représentera plus de 3 % des actifs existants», a dit le prince saoudien, également ministre de la Défense.

«Aucun projet d'investissement ou de développement dans n'importe quelle région du monde ne se fera qu'en passant par le fonds souverain saoudien», a-t-il prédit.

Selon lui, le nouveau fonds inclura les quelque 600 milliards de dollars d'actifs dont dispose actuellement le royaume, ainsi que les dividendes de la vente partielle d'Aramco et des compagnies immobilières et industrielles de l'État.

Ce vaste plan de réformes et de restructuration de l'économie saoudienne a été approuvé lundi par le Conseil des ministres lors de sa réunion hebdomadaire présidée par le roi Salmane.

Âgé de 30 ans, son fils préside aussi le Conseil des affaires économiques et de développement, organe qui supervise Saudi Aramco, pilier économique du royaume qui contrôle des réserves prouvées de plus de 261 milliards de barils et emploie plus de 61 000 personnes.

Initiateur du plan baptisé «Vision saoudienne à l'horizon 2030», le jeune prince a défendu l'ouverture d'Aramco au capital local et étranger qui, selon lui, va assurer «la transparence» dans la gestion du géant pétrolier.

«Dépendance maladive»

«Nous avons tous une dépendance maladive vis-à-vis du pétrole en Arabie saoudite, ce qui est dangereux. Cela a entravé le développement de plusieurs secteurs ces dernières années», a-t-il martelé, dans une allusion apparente aux critiques concernant la privatisation partielle d'Aramco.

Après Aramco, «ce sera au tour des filiales d'être introduites en Bourse», a encore dit le prince, en tablant sur une économie qui ne dépend «plus du pétrole, mais (qui tire) ses revenus des investissements».

L'économie saoudienne en crise devrait croître au rythme de 1,2 % cette année, contre 3,4 % en 2015.

L'effondrement des cours pétroliers a obligé les monarchies du Golfe, dont l'Arabie saoudite, à prendre des mesures sans précédent portant sur la réduction des subventions sur les carburants et l'imposition de nouvelles taxes indirectes.

Le royaume, qui prévoit un déficit de 87 milliards de dollars cette année après un déficit de 98 milliards en 2015, a gelé d'importants projets économiques.

Dans ce pays, où ses quelque 21 millions de citoyens étaient habitués à l'État-providence, la réduction des subventions sur l'eau et l'électricité a suscité des remous et conduit au limogeage du ministre responsable de ces deux secteurs.

«Les subventions doivent bénéficier à la classe moyenne et aux moins nantis» alors que «70 % de ces subventions vont aux riches», a expliqué le prince Mohammed en dénonçant au passage «la corruption» dans le royaume et en affirmant lier désormais tout contrat d'armement au développement d'une industrie militaire locale.

«Désormais, le ministère de la Défense et les autres organes de sécurité et militaires ne passeront de contrat avec un fournisseur étranger que s'il est lié à une industrie locale», a dit le prince saoudien.