L'agence de notation Standard & Poor's (S&P) s'est déclarée mercredi beaucoup plus préoccupée par la situation «alarmante» des pays émergents, qui subissent l'impact de la chute du pétrole, que par le ralentissement chinois qui reflète la transition de son économie.

«Nous sommes beaucoup plus inquiets sur les perspectives des pays émergents hors Chine et, en particulier, les pays producteurs de matières premières» que par le ralentissement du géant asiatique, a reconnu Jean-Michel Six, le chef économiste de l'agence pour l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique, lors d'une conférence de presse.

«Aujourd'hui, la bénédiction qu'a représenté pour les consommateurs des pays développés la baisse du pétrole se retourne et devient principalement une mauvaise nouvelle pour l'économie mondiale», a-t-il ajouté, soulignant les risques de cette chute pour «les perspectives de croissance et géopolitiques dans les pays émergents», producteurs fortement dépendants du cours des matières premières et plus particulièrement du pétrole.

Avec un prix du pétrole qui s'approche des 30 dollars le baril et qui pourrait encore baisser au deuxième trimestre, «nous sommes dans une zone d'incertitude et de faiblesse qui devient alarmante», a prévenu M. Six.

«Quand vous observez la situation et les perspectives de croissance, d'un côté, et les perspectives démographiques, de l'autre, dans les pays de l'Afrique sub-saharienne, vous ne pouvez pas ne pas conclure que nous sommes face à un danger, à un risque qui est très important et qui aujourd'hui encore sous-estimé», a-t-il souligné.

Le chef économiste de S&P a notamment cité le «cas extrêmement grave» du Brésil, le géant sud-américain qui a plongé dans une forte récession l'an dernier. «Ce pays prend tout d'un coup: il est pénalisé à la fois par le resserrement monétaire américain (...), par la Chine, par les matières premières et par une politique économique et surtout une gouvernance économique qui a ses faiblesses», a-t-il décrit.

En revanche, le ralentissement chinois, qui a suscité de fortes chutes sur les marchés boursiers depuis le début de l'année, ne suscite pas la même préoccupation chez l'économiste.

Selon lui, il convient «d'en relativiser l'ampleur». D'autant plus qu'il juge ce «ralentissement bienvenu», citant d'autres exemples de pays, comme le Japon, qui ont connu dans leur histoire une transition de «l'investissement vers la consommation».

«C'est un phénomène qui paraît inévitable», a expliqué M. Six, qui ne juge pas nécessaire de le combattre.

«Il serait souhaitable que les autorités chinoises abandonnent la cible de 7% (de croissance du PIB)», a-t-il affirmé.

«D'abord parce qu'elles sont condamnées à la louper la plupart du temps et, d'autre part, sur le plan des marchés financiers au jour le jour, cela devient une espèce d'obsession de savoir si la Chine va atteindre 7% ou pas», a-t-il assuré.