La production industrielle chinoise a encore ralenti en octobre, selon des chiffres officiels, qui confirment l'essoufflement des moteurs traditionnels de la deuxième économie mondiale mais soulignent aussi la robustesse des ventes au détail, baromètre de la consommation --et ce alors qu'une journée d'achats frénétiques en ligne absorbait mercredi le pays tout entier.

La production industrielle en Chine a progressé le mois dernier de 5,6% sur un an, a indiqué le Bureau national des statistiques (BNS), ce qui signe un fléchissement continu après des hausses de 6,1% en août et 5,7% en septembre... et très loin des 7,9% de décembre 2014.

C'est moins que la prévision moyenne des analystes sondés par l'agence Bloomberg News (+5,8%). Dans le même temps, la production d'électricité a reculé de 3,2% sur un an.

Alors que le secteur industriel chinois reste miné par les surcapacités et une demande sans éclat, ce nouveau ralentissement de la production succède à des salves d'indicateurs moroses --dont des contractions répétées de l'activité manufacturière ces derniers mois et des plongeons conjugués des exportations et importations du pays.

Quant aux investissements en capital fixe, qui traduisent les dépenses dans les infrastructures, ils ont gonflé de 10,2% sur un an durant les dix premiers mois de l'année, mais décélèrent eux aussi, entravés par le coup de mou des investissements immobiliers.

Pourtant, les chiffres du BNS dépeignent un tableau contrasté de la conjoncture chinoise.

Ainsi, «si les indicateurs d'activité sont toujours ternes (...) la consommation a bien résisté», et «la robustesse des ventes au détail suggère que l'économie chinoise pourrait se reprendre au cours des prochains trimestres», commente Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.

La consommation, un nouveau moteur?

Les ventes au détail, considérées comme le baromètre des dépenses des ménages, ont augmenté en octobre de 11% sur un an, a indiqué le BNS, marquant une légère accélération et s'inscrivant au-dessus des attentes du marché.

Désormais, près de 10% des ventes au détail recouvrent des opérations sur internet: sur les dix premiers mois de 2015, les ventes en ligne en Chine se sont envolées de 35% à 2950 milliards de yuans, selon le BNS.

Hasard du calendrier, cette salve de statistiques mensuelles paraît alors que bat son plein en Chine la «journée des célibataires», surnom donné au 11 novembre et prétexte à une surenchère de promotions sur les sites de vente en ligne.

Les chiffres donnent le vertige: en l'espace de douze heures, les internautes chinois ont dépensé mercredi l'équivalent de 8,5 milliards d'euros sur la populaire plateforme Tmall d'Alibaba, le géant du commerce électronique. Déjà un nouveau record. Et dans l'après-midi, les commandes continuaient de tomber.

Cette version locale du «Black Friday» américain permet de jauger l'humeur des consommateurs chinois, alors que Pékin cherche à «rééquilibrer» son modèle économique.

L'idée est de doper la consommation intérieure, les services et les industries de nouvelles technologies, au détriment des secteurs d'industries lourdes et des exportations --moteurs traditionnels de croissance connaissant un sévère essoufflement.

«Les services représentaient plus de la moitié du PIB chinois sur les trois premiers trimestres: on peut penser que le marché va éprouver le besoin de développer un nouvel arsenal d'indicateurs» pour en tenir compte, souligne Liu Li-Gang, analyste de la banque ANZ.

Croissance sous pression

Mais de l'avis général, de bonnes ventes au détail ne suffiront pas à redresser d'ici la fin de l'année la croissance économique du géant asiatique, qui devrait tomber en 2015 à un plus bas depuis un quart de siècle.

La croissance du PIB chinois a ralenti à 6,9% au troisième trimestre, selon un chiffre gouvernemental, que nombre d'experts jugent surévalué. L'objectif annuel de Pékin reste une croissance «d'environ 7%», mais il pourrait s'avérer difficile à atteindre.

Les autorités ne ménagent pas leur peine pour stimuler de concert l'activité économique et la consommation: la banque centrale (PBOC) a abaissé à six reprises en l'espace d'un an ses taux d'intérêt, mais avec des résultats mitigés, et le gouvernement s'est engagé à muscler ses mesures de relance budgétaire.

Pékin pourrait donc poursuivre ses actions de soutien, même si de nouveaux assouplissements monétaires ne devraient probablement pas intervenir avant 2016, estiment les analystes de la banque Nomura. Pour le quatrième trimestre, ils tablent sur une croissance chinoise de 6,4% seulement.