Sans surprise, la Banque du Japon a décidé mardi de maintenir en l'état sa politique monétaire et son gouverneur a relativisé les récentes faiblesses de l'économie, semblant écarter un assouplissement à court terme.

La tendance des prix est sur une voie ascendante, a assuré Haruhiko Kuroda lors d'une conférence de presse. Selon lui, la situation n'est pas comparable au scénario de fin octobre 2014 quand la Banque du Japon avait étendu son programme de rachat d'actifs.

Et si l'archipel a vu les prix à la consommation reculer en août pour la première fois en plus de deux ans, c'est la chute des prix de l'énergie, et elle seule, qui est en cause. Mais une fois que cet impact se sera dissipé, l'inflation se redressera pour atteindre l'objectif de 2% courant 2016.

«Si nécessaire nous prendrons des mesures supplémentaires sans hésiter», a cependant ajouté le gouverneur, reprenant la formule consacrée.

De nombreux acteurs parient sur un geste de la banque centrale lors de sa réunion du 30 octobre, date à laquelle l'institution devrait, selon des informations de presse, réviser négativement ses prévisions de croissance et d'inflation.

Pour l'heure, les neuf membres du comité de politique monétaire ont reconduit, à huit voix contre une, le dispositif d'assouplissement qualitatif et quantitatif visant à augmenter la base monétaire de 80 000 milliards de yens par an (près de 868 milliards de dollars CAD).

«L'économie japonaise continue de se redresser modérément», a estimé la Banque du Japon dans un communiqué quasi identique à celui de mi-septembre. Elle avait alors pris acte pour la première fois des aléas extérieurs, ce qu'elle répète: «Les exportations et la production industrielle sont affectées par le ralentissement des économies émergentes», en particulier de la Chine.

Hormis cette concession, elle a de nouveau dressé un tableau positif, jugeant que la consommation des ménages se porte bien «sur fond d'amélioration des conditions d'emploi et des revenus», de même que l'investissement des firmes qui peuvent s'appuyer sur de solides profits. «Le cercle vertueux fonctionne», a insisté M. Kuroda.

Des Abenomics qui s'essoufflent

Seul ajout notable, une référence au moral des entrepreneurs, «qui se maintient dans l'ensemble à un niveau favorable, bien qu'une certaine prudence ait pu être observée en certains endroits». La banque centrale fait ainsi référence à l'enquête Tankan publiée la semaine dernière, qui a révélé un déclin du moral des grandes entreprises manufacturières.

Les observateurs ont accueilli avec circonspection ce diagnostic résolument optimiste, à contre-courant de statistiques décevantes.

Le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé mardi à 0,6% sa prévision de croissance en 2015 pour le Japon, timide rebond après un recul de 0,1% en 2014. La troisième puissance économique mondiale se situe à la traîne des autres économies avancées (+2,6% en 2015 aux États-Unis, +1,5% pour les quatre pays phares de la zone euro - Allemagne, France, Italie, Espagne).

Devant l'essoufflement de la politique de relance «Abenomics», l'institution a appelé le gouvernement du premier ministre conservateur Shinzo Abe à mettre en place des «réformes structurelles énergiques».

Les exportations ont fléchi en volume en août et la production industrielle a accusé une baisse inattendue, si bien que désormais les économistes redoutent une rechute de l'archipel en récession - deux trimestres consécutifs de repli du PIB.