Les États-Unis, le Japon et dix autres pays de la région Pacifique se retrouvent cette semaine à Hawaï pour mettre la dernière main à un vaste accord de libre-échange commercial dont les bienfaits économiques font débat.

Comme son cousin européen baptisé TTIP et lui aussi hautement controversé, le «Trans-Pacific Partnership» ou TPP est souvent accusé de se négocier dans l'opacité avec l'objectif inavoué de favoriser les multinationales.

Les douze pays qui se retrouvent à partir de mardi dans l'île américaine au milieu du Pacifique assurent au contraire que cet accord dopera la croissance dans la région et imposera au géant chinois, qui n'est pas partie aux discussions, d'ouvrir davantage son économie.

«Si nous n'écrivons pas les règles du commerce mondial, devinez quoi? La Chine le fera. Et ils feront de façon à avantager les entreprises et travailleurs chinois», avait déclaré en mai le président américain Barack Obama, ardent promoteur de ce traité.

Après des années de discussions, Washington et ses partenaires, qui pèsent ensemble 40% du produit intérieur brut mondial, espèrent que la session d'Hawaï aboutira à un accord ou, au moins, posera les bases d'un compromis à court terme.

Début juillet, le gouvernement australien disait ainsi s'attendre à un accord «dans les trois à quatre prochaines semaines».

Âpre bataille

Les États-Unis ont mis tout leur poids dans la balance pour faire avancer les négociations, qui visent à alléger les barrières douanières et réglementaires afin d'accélérer les échanges.

Après une âpre bataille au Congrès, jouée en partie contre ses propres alliés démocrates, Barack Obama a ainsi obtenu fin juin des pouvoirs de négociations accrus qui amenuisent la possibilité pour les élus américains de détricoter un futur accord.

Pour les autres pays TPP, situés sur le continent américain (Pérou, Chili, Canada, Mexique), en Asie (Brunei, Japon, Malaisie, Singapour, Vietnam) ou en Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande), les enjeux sont également de taille.

Troisième économie mondiale, le Japon espère ainsi que cet accord l'aidera à faire passer des réformes intérieures impopulaires pour libéraliser le secteur agricole. Le Vietnam espère, lui, conquérir de nouveaux marchés qui lui sont aujourd'hui fermés.

«Ce sont les négociations commerciales les plus importantes que nous avons eues en vingt ans», a expliqué à l'AFP Peter Petri, auteur d'une étude sur le TPP pour le centre de réflexion washingtonien Peterson Institute.

«Il aura d'importants bénéfices indirects sur la manière dont les règles commerciales à travers le monde seront rebâties», a-t-il ajouté.

C'est précisément les craintes de la société civile qui redoute que ce Traité Trans-Pacifique n'aboutisse à une déréglementation générale au détriment des droits environnementaux et sociaux.

«Il est évident que le TPP ne créera pas d'emplois, pas plus qu'il ne protégera l'environnement ou garantira la bonne qualité des importations», indique ainsi un des principaux syndicats américains, l'AFL-CIO, redoutant que les multinationales en soient les «principaux bénéficiaires».

Selon des documents confidentiels publiés par le site WikiLeaks, le TPP pourrait ainsi permettre à des investisseurs de poursuivre des États en justice, conduire à une augmentation du prix des médicaments et renforcer la protection de la propriété intellectuelle au détriment des consommateurs.

«Les gens paieront plus pour leurs médicaments ou pour des produits protégés par des brevets. C'est la même chose qu'une hausse des impôts», assure Dean Baker du think tank progressiste Center for Economic and Policy Research.

Ces critiques font écho à celles adressées à l'accord de libre-échange qu'Américains et Européens négocient avec peine depuis juillet 2013.

Un compromis sur l'accord Trans-Pacifique est sans aucun doute plus proche qu'en Europe mais le temps presse pour l'administration Obama.

Des élections présidentielles et législatives sont prévues aux États-Unis pour novembre 2016 et tout retard pourrait compromettre la ratification du Traité par le Congrès.