L'inflation en Chine a fortement ralenti en mai, symptôme supplémentaire d'une consommation désespérément terne sur fond de ralentissement économique, ce qui pourrait ouvrir la voie à de nouvelles mesures de soutien de la part des autorités.

La hausse des prix à la consommation, principale jauge de l'inflation dans la deuxième économie mondiale, s'est établie à 1,2% sur un an le mois dernier, a annoncé mardi le Bureau national des statistiques (BNS).

Elle était remontée à 1,5% en avril, un sursaut qui s'est avéré précaire. Le chiffre de mai s'inscrit d'ailleurs en deçà de la prévision médiane des analystes interrogés par l'agence Bloomberg (+1,3%).

Pour les analystes de la banque ANZ, la faiblesse de l'inflation traduit «une consommation intérieure toujours maussade», alors que l'activité continue de fléchir.

La hausse des prix avait glissé en janvier sous le seuil de 1% pour la première fois en cinq ans, laissant planer le spectre d'une spirale déflationniste.

La publication du BNS faisait suite à des statistiques décevantes publiées lundi sur le commerce extérieur: les importations chinoises ont dégringolé de 17,6% sur un an en mai, reculant pour le septième mois consécutif, là encore signe de demande atone.

Et l'activité du secteur manufacturier, miné par les surcapacités, s'est de nouveau contractée le mois dernier, selon un récent indicateur de la Banque HSBC.

Témoignant de l'absence d'embellie, l'indice mesurant l'évolution des prix à la vente à la sortie d'usine (PPI) a reculé en mai - et pour le 39e mois consécutif - de 4,6% sur un an, a ajouté le BNS.

Une baisse plus accentuée qu'attendu, et de même ampleur que les replis en mars et en avril.

Marge de manoeuvre 

Baromètre d'une consommation sans éclat, l'inflation a même reculé de 0,2% en mai par rapport à avril, notamment à la faveur d'un repli sensible des prix alimentaires (-0,9% sur un mois), a précisé le BNS.

Sur un an, les prix alimentaires s'affichaient en hausse de 1,6%, un tassement marqué après +2,7% en avril, qui s'expliquait par le fort ralentissement des prix du porc, poids lourd de l'indice, tandis que ceux des oeufs dégringolaient de 13%.

De même, les coûts des transports et des télécommunications ont trébuché de 1,3% sur un an --notamment après une pression de Pékin sur les opérateurs télécoms pour réduire les tarifs de l'internet.

«Mais la modération de l'inflation alimentaire camoufle une remontée sur les prix non alimentaires, qui dans l'ensemble ont légèrement accéléré», même si c'est seulement de +1% sur un an, tempérait Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics, pariant sur un net sursaut des prix «dans les prochains mois».

Dans tous les cas, on reste très en deçà du niveau-cible d'inflation que s'est fixé le gouvernement pour l'ensemble de l'année (+3%).

Pour tenter d'enrayer les risques déflationnistes et stimuler l'activité, la banque centrale (PBOC) a multiplié depuis novembre les assouplissements de politique monétaire, abaissant à plusieurs reprises ses taux d'intérêt, mais avec des résultats jugés limités.

De l'avis général, alors que la Chine devrait connaître cette année sa plus faible croissance économique depuis un quart de siècle, les autorités n'auront d'autre choix que de muscler encore davantage leurs mesures de soutien.

«L'inflation très basse offre justement une marge de manoeuvre pour une politique encore plus accommodante», observait Yang Zhao, de Nomura, misant sur une nouvelle baisse des taux d'intérêt en juillet.

De tels assouplissements sont «absolument nécessaires», selon les analystes de ANZ, qui notent que les «coûts pour se financer demeurent très élevés pour les entreprises, alors même que leurs profits se détériorent».

Or si Pékin vante volontiers ses efforts de «rééquilibrage» du modèle économique chinois, le gouvernement ne cache pas sa volonté d'éviter tout ralentissement trop violent, et se dit prêt à des «ajustements» pour accompagner la «nouvelle normalité» d'une croissance ralentie.