L'impasse des négociations entre la Grèce et ses créanciers a désormais un coût économique, ce qui renforce le sentiment d'urgence alors qu'Athènes multiplie les contacts dans l'espoir d'obtenir au plus vite l'argent dont elle a cruellement besoin.

En seulement trois mois, date des dernières prévisions de la Commission, le tableau s'est considérablement dégradé, alors que le reste de la zone euro profite d'une embellie économique grâce à une série de facteurs extérieurs: maintien des prix du pétrole à des niveaux bas, croissance mondiale soutenue, poursuite de la dépréciation de l'euro et politique de la BCE.

La croissance grecque devrait s'élever à seulement 0,5% cette année, selon les prévisions économiques de la Commission publiées mardi, contre 2,5% encore espéré au mois de février. Une révision à la baisse «inévitable», a jugé Pierre Moscovici, le commissaire en charge des Affaires économiques, lors d'une conférence de presse.

Le gouvernement grec, dirigé depuis fin janvier par la gauche radicale du premier ministre Alexis Tsipras, table sur une croissance de 2,9% cette année. Mais l'économie grecque, qui avait amorcé son redressement en milieu d'année dernière, s'est de nouveau contractée fin 2014.

«L'élan positif a été brisé par les incertitudes depuis l'annonce d'élections anticipées en décembre», estime la Commission européenne, pour qui «l'absence actuelle de clarté» sur la politique du gouvernement vis-à-vis de ses créanciers «fait empirer la situation».

Les finances publiques devraient elles aussi se dégrader, avec un déficit de 2,1% cette année, puis de 2,2% en 2016, contre des excédents de 1,1% puis 1,6% envisagés en février. La colossale dette grecque devrait bondir pour atteindre 180,2% cette année, contre 170,2% il y a encore trois mois.

La Grèce devrait aussi rester en déflation cette année (-1,5%), un phénomène marqué par une baisse durable des prix et des salaires qui pèse sur la reprise économique.

«Un signal attendu»

L'inquiétude s'est emparée de certains secteurs d'activité en raison des sérieuses difficultés entre Athènes et ses créanciers, qui négocient de nouvelles réformes en échange du versement d'une tranche d'aide de 7,2 milliards d'euros, bouclant le programme d'assistance financière de 240 milliards d'euros lancé en 2010.

«Il y a toujours des bases pour une reprise de la croissance en 2016 à condition, bien sûr, que nous puissions revenir sur les rails de nos discussions et le cap des réformes qui doivent être poursuivies en Grèce», a souligné M. Moscovici. Bruxelles prévoit une croissance de 2,9% l'an prochain en Grèce, grâce à un redémarrage de l'investissement.

Encore faut-il trouver un accord pour le versement de la dernière tranche du programme et sur une forme de soutien au pays pour la suite. Après des mois de blocage, les discussions ont enregistré de légers progrès ces derniers jours, mais ils ne devraient pas permettre une conclusion positive le 11 mai lors de la prochaine réunion des ministres des Finances de la zone euro.

«J'espère que d'ici le 11 mai, nous pourrons enregistrer de bons progrès, je veux dire de forts progrès, c'est là le signal attendu par tout le monde», a estimé M. Moscovici. «Le gouvernement grec doit faire des choix. Le temps presse», a renchéri le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis.

La Grèce est en quête urgente d'un accord sur son financement. À en croire les responsables du gouvernement, les caisses sont vides, alors que le pays doit rembourser un total d'environ un milliard d'euros en mai, dont 200 millions dès mercredi.

Les contacts s'intensifient au plus haut niveau. M. Tsipras s'est entretenu lundi avec la chancelière allemande Angela Merkel pour évoquer «le cours des négociations et échanger des points de vue sur l'accord entre la Grèce et ses partenaires».

Athènes a dépêché mardi ses principaux négociateurs politiques, dont le ministre des Finances Yanis Varoufakis, dans plusieurs grandes villes européennes. Il devait rencontrer M. Moscovici à Bruxelles dans l'après-midi.

Mais à Berlin, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble s'est dit «plutôt sceptique» sur les chances d'un accord dans les prochains jours entre la Grèce et les institutions.