Les députés allemands ont levé vendredi le dernier blocage aux aides internationales qui doivent accorder un répit à la Grèce en approuvant à une écrasante majorité une extension de quatre mois décidée mardi par les Européens.

Malgré la ligne dure adoptée par Berlin, soutenu par le nord de l'Europe mais aussi par certains pays du sud confrontés à l'austérité, 541 parlementaires ont dit oui à un prolongement du programme d'aides jusqu'au 30 juin, selon un décompte définitif du Bundestag.

Ce feu vert ne faisait pas de doutes, l'ensemble des partis représentés à la chambre basse du Parlement allemand ayant appelé à soutenir le texte.

Néanmoins, 32 députés ont voté contre et 13 ont voté blanc, essentiellement issus des rangs conservateurs de la chancelière, Angela Merkel. D'autres avaient dit ressentir «des maux de ventre» à l'idée de devoir soutenir la Grèce dont le gouvernement de gauche radicale défie la ligne de réformes et de rigueur budgétaire chère à Berlin.

Lors d'un vibrant plaidoyer proeuropéen avant le vote, le ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, avait exhorté les députés à donner leur aval, tout en reconnaissant qu'il ne s'agissait «pas d'une décision facile».

«Je demande à chaque député de ne pas désapprouver [l'extension des aides] car nous causerions à notre peuple et à notre avenir de trop gros dégâts», avait-il souligné.

Pas de chantage

Les élus devaient dire s'ils approuvaient ou non l'extension de quatre mois d'un programme d'aides européen pour la Grèce adopté en 2012 et qui prévoit 140 milliards d'euros d'aides sous forme de prêts. Ce programme devait initialement arriver à expiration ce vendredi à minuit.

Le Bundestag était le seul Parlement en Europe appelé à se prononcer sur cet accord.

Face à des Allemands majoritairement hostiles, M. Schäuble a cherché à rassurer, insistant sur le fait qu'il ne s'agissait en aucun cas d'accorder de «nouveaux milliards à la Grèce» ou de modifier les termes du contrat passé avec un pays aux abois.

Le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a enjoint Athènes «à respecter ses obligations envers ses partenaires européens et le Fonds monétaire international», dans une interview à une radio allemande.

Non sans mal, cette extension avait été arrachée mardi à l'issue d'un intense bras de fer entre Berlin et Athènes, au cours duquel le ton est monté très haut, notamment entre M. Schäuble et son homologue grec, Yanis Varoufakis.

Le gouvernement d'Alexis Tsipras, élu fin janvier sur la promesse de porter un coup d'arrêt à la politique d'austérité défendue par l'Allemagne, s'était finalement engagé à poursuivre ses réformes et les mesures d'économie.

Mais M. Varoufakis, lui-même sous la pression de son opinion publique, a indiqué vendredi avoir délibérément présenté un programme de réformes flou pour s'assurer l'aval des Parlements de la zone euro. Cette déclaration, perçue comme une provocation à Berlin, annonce que le bras de fer est loin d'être terminé.

L'urgence de s'entendre avec ses créanciers était d'autant plus grande pour Athènes que l'économie s'est contractée plus que prévu en fin d'année dernière, avec un recul du PIB de 0,4 % au quatrième trimestre.

Wolfgang Schäuble a prévenu vendredi qu'Athènes devait désormais «se tenir aux mesures [de rigueur] nécessaires» et ce «sans aucune réserve».

Il a cité en exemple d'autres pays européens dont la France qui, malgré «des débats difficiles [...] a mené de grandes réformes structurelles».

«Encore beaucoup de travail»

La chancelière, qui n'a jusqu'ici rencontré le premier ministre grec, Alexis Tsipras, qu'une seule fois et brièvement à Bruxelles, avait prévenu mercredi qu'il restait «encore beaucoup de travail» après cet accord.

Depuis le début des plans de sauvetage pour la Grèce en 2010, les Allemands ont toujours lié ces aides à des conditions strictes de réformes, soulignant que le pays à genoux avait provoqué lui-même ses maux, en favorisant la corruption et le clientélisme.

Malgré cela, l'opinion allemande est hostile à ces aides. Quelque 71 % des Allemands ont peu confiance dans le fait que les dirigeants grecs tiendront leurs promesses économiques, selon un sondage pour la chaîne ZDF.

Vendredi, le quotidien le plus lu d'Europe, Bild, à la ligne éditoriale très anti-grecque, publiait même des selfies de lecteurs exhibant une pleine page du journal barrée d'un «NEIN!», afin de dénoncer les nouveaux milliards pour Athènes.