L'Europe s'est engagée vendredi à prolonger le financement de la Grèce de quatre mois, évitant un risque de sortie de l'euro, mais sous de strictes conditions soumises à examen dès la semaine prochaine.

«Quatre mois, c'est le délai approprié en terme de financement et compte tenu des défis à relever», a estimé Jeroen Dijsselbloem, le président de l'Eurogroupe, lors d'une conférence de presse.

Le compromis a été trouvé au prix de nombreux engagements grecs, au terme d'une réunion «laborieuse», la troisième en moins de dix jours pour les 19 ministres de la zone euro.

Athènes doit présenter d'ici lundi soir une liste de réformes qui devra être approuvée par ses créanciers, désormais désignés sous le terme d'«institutions» (UE, BCE et FMI), les Grecs ne voulant plus entendre parler de la «troïka».

Ce premier feu vert devra être donné lors d'un Eurogroupe téléphonique mardi. En cas de rejet des propositions grecques, «nous aurons un problème (...) l'accord est mort, mais cela ne sera pas le cas», a déclaré le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis.

Athènes a dû se résoudre à rester sous haute supervision de ses créanciers, mais «il y aura un travail d'une autre nature. Il y aura sûrement un travail politique», a affirmé le ministre français, Michel Sapin, en soulignant que les Grecs ne voulaient plus avoir en face d'eux des «techniciens».

«Être au gouvernement, c'est un rendez-vous avec la réalité. Assez fréquemment, ce n'est pas aussi beau que dans un rêve», a commenté le ministre conservateur allemand, Wolfgang Schäuble, qui ne cachait plus son exaspération croissante envers le nouveau gouvernement grec de gauche radicale.

La liste de mesures devra être précisée d'ici fin avril. Seul un tel «progrès» permettra la reprise des versements au pays, gelés depuis septembre, a relevé M. Dijsselbloem.

Mais en attendant, l'accord ne garantit pas que le pays reste à flot. «Nous ne sommes pas allés aussi loin (...) de sérieuses discussions seront menées ces prochaines semaines sur les moyens de combler le trou budgétaire du pays», a admis M. Varoufakis.

«Bâtir la confiance»

Athènes s'est également engagé à ne pas annoncer de nouvelles mesures de manière unilatérale et à respecter ses promesses de rembourser ses créanciers. Le gouvernement sera par contre dispensé d'imposer une nouvelle hausse de TVA, de nouvelles coupes dans les retraites ou de davantage déréguler le marché du travail, selon le ministre grec.

«C'est le début d'une nouvelle phase sans mémorandum», qui imposait une austérité de fer depuis 2010, s'est félicité le ministre. «Nous nous sommes engagés à écrire notre propre script». «La Grèce laisse le mémorandum derrière elle et devient coauteur des réformes et de sa destinée», a insisté M. Varoufakis.

«La Grèce et les institutions européennes avaient besoin de stabilité, de calme, de visibilité. (...) Première étape lundi, deuxième étape fin avril, troisième étape fin juin», a résumé Michel Sapin.

Il s'agissait avant tout de «bâtir la confiance», a estimé M. Dijsselbloem, reconnaissant qu'il avait fallu «d'intenses négociations».

Le processus doit permettre de renflouer les caisses grecques, avec 1,8 milliard d'euros du Fonds de soutien de la zone euro (FESF) et 1,8 milliard venant des profits de la BCE sur les obligations grecques. En revanche, Athènes ne pourra pas puiser dans les quelque 11 milliards d'euros de fonds pour la recapitalisation des banques grecques, comme cela avait été évoqué.

Pour rétablir le dialogue entre Athènes et Berlin, en dépit de l'inimitié palpable entre MM. Varoufakis et Schäuble, une médiation a été menée par la zone euro, le FMI et la Commission européenne.

Le premier ministre grec, Alexis Tsipras, avait fait monter la tension en affirmant qu'en cas d'échec, il réclamerait la tenue en urgence d'un sommet européen dimanche.

La Grèce tenait absolument à tourner la page de l'austérité. Mais l'Allemagne, plus que jamais garante de l'orthodoxie budgétaire en Europe, exigeait que le pays poursuive l'assainissement de ses finances publiques et les réformes structurelles auxquelles elle a été contrainte en échange de 240 milliards d'euros de prêts depuis 2010.