L'emblématique Royal Bank of Scotland (RBS) a menacé de déplacer son siège social en Angleterre si l'Écosse devenait indépendante, nouvelle salve du tir de barrage engagé par les poids lourds du monde des affaires britannique contre une éventuelle sécession.

À une semaine d'un référendum historique, où les Écossais se prononceront pour le maintien ou non de leur région au sein du Royaume-Uni, les grandes entreprises se font bruyamment entendre pour pointer les risques de rupture d'une alliance de plus de 300 ans.

Leur entrain à mettre en garde les électeurs sur les conséquences économiques -incertaines- d'une indépendance a redoublé depuis la publication de sondages attestant un resserrement des intentions de vote, au profit des indépendantistes.

«De nombreuses incertitudes entourent le référendum écossais qui pourrait avoir des conséquences sur l'environnement fiscal, monétaire, légal, le système de régulation et la notation de la banque», a expliqué jeudi RBS.

«Face aux possibles conséquences pour le milieu des affaires d'un vote 'oui' (...), RBS pense qu'il serait nécessaire de relocaliser son siège social et sa principale branche opérationnelle en Angleterre», a-t-elle ajouté.

Basée en Écosse depuis 1727, avec un siège social à Édimbourg, la banque est majoritairement détenue par l'État britannique qui avait volé à son secours au moment de la crise financière internationale.

Le chef des indépendantistes et du gouvernement régional écossais, Alex Salmond, a immédiatement dénoncé une manoeuvre «politique» orchestrée par le gouvernement britannique à Westminster.

Pour tenter de rassurer, il a cité un courrier envoyé aux employés par le directeur général de RBS, dans lequel celui-ci assure que ce changement d'adresse n'aurait aucun impact sur l'emploi en Écosse.

La banque compte 11 500 salariés dans cette région septentrionale.

Dans son communiqué, RBS a souligné que ce déplacement éventuel n'aurait «aucun impact sur les clients de toutes les îles britanniques», qu'ils soient en Écosse, en Angleterre, au Pays de Galles ou en Irlande du Nord.

Petits patrons indépendantistes

Reste que cette intervention n'est pas isolée, au lendemain d'une déclaration d'un autre géant de la banque britannique, Lloyds, qui envisage de déplacer son siège social de l'Écosse vers l'Angleterre.

Partiellement détenu par l'État, le groupe compte 16 000 salariés dans la région, mais ce changement serait surtout d'ordre technique: il permettrait à Lloyds, dont l'essentiel des affaires est déjà basé à Londres, de se placer sous le giron de la Banque d'Angleterre.

Les dirigeants politiques britanniques ont en effet écarté toute union monétaire entre le reste du Royaume-Uni et l'Écosse si elle optait pour l'indépendance, et le secteur financier se demande qui assurerait la fonction de prêteur de dernier ressort (actuellement la Banque d'Angleterre) pour les établissements restés au nord.

Un autre grand de la finance écossaise, Standard Life, a d'ailleurs prévenu aussi qu'il transfèrerait si nécessaire en Angleterre une partie des fonds gérés pour ses clients britanniques.

Seule note discordante, le directeur général du gestionnaire de fonds écossais Aberdeen Asset Management, Martin Gilbert, a estimé qu'une indépendance de la région serait «un grand succès».

Mais des non-Britanniques commencent aussi à entonner le refrain anti-sécession, comme la National Australia Bank qui pourrait déplacer sa filiale basée en Écosse, Clydesdale Bank, vers le sud.

Le géant pétrolier BP, très actif en mer du Nord, a répété de son côté que ces gisements seraient à son avis mieux exploités «si les capacités et l'intégrité du Royaume-Uni étaient maintenues».

Cerise sur le gâteau, le Financial Times, bible des milieux d'affaires, a appelé jeudi les Écossais à rejeter «l'humeur populiste» qu'il accuse M. Salmond d'exploiter, dans un éditorial au vitriol.

Moins audible que les poids lourds, les petites firmes écossaises sont néanmoins beaucoup plus partagées. Plus de 200 chefs d'entreprises avaient signé fin août un vibrant appel à l'indépendance.

Dans une pétition en réponse à d'autres patrons en faveur du non, ils avaient accusé Londres de considérer l'Écosse comme «une vache à lait» et promis de construire une société «plus juste et prospère» débarrassée du tuteur londonien.