La Banque du Japon est restée fidèle à sa ligne de conduite mardi en maintenant inchangée sa politique d'assouplissement monétaire, un des trois piliers des «Abenomics», jugeant le pays sur la voie d'une «reprise modérée».

Dans un communiqué quasiment identique aux précédents, l'institut d'émission a réitéré sa confiance en l'activité économique de l'archipel, à l'issue d'une réunion de deux jours de son organe de direction. «L'économie japonaise continue de se reprendre à un rythme modéré», répète la Banque du Japon.

Certes, la consommation a plongé en mai, sous l'effet d'une hausse de la TVA japonaise le 1er avril (passée de 5% à 8%), alors que les Nippons s'étaient auparavant rués dans les magasins pour faire des provisions.

Mais cette baisse de la demande «a été largement conforme à nos attentes» et ses effets «devraient s'estomper progressivement», a assuré le gouverneur de la Banque du Japon, Haruhiko Kuroda, lors d'une conférence de presse.

Forte de ce constat, la banque centrale a globalement maintenu ses prévisions, hormis une petite retouche, signe de son optimisme mesuré.

Elle table désormais sur une hausse de 1% du produit intérieur brut (PIB) de la troisième puissance économique mondiale d'avril 2014 à mars 2015 contre 1,1% annoncé en avril et 1,4% précédemment. Pour 2015-2016, la croissance devrait être de 1,5% (prévision inchangée).

L'inflation, elle, est toujours attendue à 1,3% pour l'année budgétaire en cours, hors effet de hausse de la taxe à la consommation, puis à 1,9% en 2015-2016 et 2,1% l'année suivante, en ligne avec l'objectif «de progression des prix de 2% par an de façon durable».

Mandaté par le premier ministre de droite Shinzo Abe pour lutter contre la déflation endémique qui sévit au Japon depuis la fin des années 1990, M. Kuroda a lancé en avril 2013 une politique d'«assouplissement monétaire quantitatif et qualitatif».

Sa mission: doubler la masse monétaire du Japon en deux ans, c'est-à-dire les liquidités en circulation et les réserves obligatoires des banques, afin d'inciter ces dernières à prêter aux entreprises et consommateurs. Le tout pour enclencher un cercle vertueux.

«Trop tôt pour crier victoire»

Dans ce but, la banque centrale va continuer à élever la base monétaire de 60 000 milliards à 70 000 milliards de yens (635 à 740 milliards de dollars CAN) par an, principalement via l'acquisition d'obligations d'État.

Cette politique «produit les effets voulus» et elle sera mise en oeuvre «aussi longtemps que nécessaire», souligne une nouvelle fois la Banque du Japon, sans exclure d'éventuels «ajustements» si besoin.

Les analystes, qui avaient spéculé dans un premier temps sur un assouplissement dès cet été, fixent dorénavant l'échéance à l'automne.

«Nous attendons une extension» des mesures au-delà de la durée initiale de deux ans, note Marcel Thieliant de Capital Economics, qui prévoit une annonce de la Banque du Japon à l'occasion de la publication du prochain rapport semestriel fin octobre.

«Il est trop tôt pour crier victoire», estime l'analyste. Et de rappeler que le gouverneur lui-même s'estime à «mi-chemin».

En outre, seules «des réformes structurelles profondes et une période prolongée d'austérité fiscale», pour tenter d'enrayer la dette colossale, sont à même d'assurer le succès des «Abenomics», prévient M. Thieliant.

Le mois dernier, M. Kuroda avait lui-même pressé le gouvernement d'agir. Depuis, M. Abe a promis «un coup d'accélérateur». Au programme, une baisse de l'impôt sur les sociétés, des incitations au travail des femmes ou encore des simplifications administratives.

Cette «troisième flèche» de son programme - visant à compléter d'importantes dépenses budgétaires (pour plus de cent milliards d'euros en un an et demi) et l'action de la banque centrale - a tardé jusqu'ici à se concrétiser, menaçant, selon certains observateurs, dont le Fonds monétaire international (FMI), la reprise naissante.

Témoin de la prudence des acteurs économiques, la confiance des grandes entreprises japonaises est retombée en juin, pour la première fois en six trimestres, selon l'étude «Tankan» de la Boj révélée début juillet.