L'Ukraine s'est résolue mercredi à une drastique et impopulaire hausse des prix du gaz pour les ménages afin d'obtenir une aide financière du FMI permettant au pays d'échapper à la faillite.

Le gouvernement de transition au travail depuis un mois à Kiev demande 15 milliards de dollars au Fonds et avait prévenu dès sa mise en place que l'Ukraine devait se préparer à des douloureux sacrifices pour répondre aux exigences de l'institution basée à Washington.

Le couperet est tombé: dès le 1er mai, la population, habituée à brûler le gaz sans compter, verra sa facture gonfler de 50%, a annoncé Iouri Kolbouchine, l'un des responsables de la compagnie gazière nationale Naftogaz, cité par les médias ukrainiens. Les industriels disposeront d'un répit supplémentaire, jusqu'au 1er juillet, et pour eux la hausse sera limitée à 40%.

Cette condition remplie, le gouvernement ukrainien espère un accord global sur un plan de sauvetage financier dès mercredi soir.

Les finances publiques de l'ex-république soviétique se trouvent dans une position critique après plus d'un an de crise économique aggravée par la crise politique et, selon les nouvelles autorités, des détournements à grande échelle de la part du régime de Viktor Ianoukovitch.

L'opérateur gazier Naftogaz se trouve lui-même en situation financière très dégradée, incapable de régler ses dettes auprès du géant russe Gazprom, qui lui fournit l'essentiel du gaz consommé dans le pays et a prévenu d'une drastique hausse du prix à partir du 1er avril, conséquence de la nouvelle orientation de Kiev.

Chute de la monnaie

Une mission du FMI se trouve à Kiev depuis le 4 mars et les négociations se sont intensifiées ces derniers jours, le premier ministre Arseni Iatseniouk ayant renoncé à sa présence au sommet des grandes puissances du G7 à La Haye pour s'y consacrer.

Selon les médias ukrainiens, les discussions bloquaient justement sur la réduction des subventions aux prix du gaz pour la population que demande le Fonds, estimant que ces dernières représentent 7% du produit intérieur brut et profitent aux plus riches, les plus gros consommateurs.

Très impopulaire, cette exigence du FMI de longue date a toujours été rejetée par le président déchu Viktor Ianoukovitch.

Le Fonds demande aussi à Kiev de prendre des mesures de restrictions budgétaires et de laisser sa monnaie flotter plus librement.

La banque centrale ukrainienne a déjà rempli en partie cette dernière condition, surtout parce que les réserves de changes dans lesquelles elle puisait sont quasi vides. Conséquence: la devise locale, la hryvnia, a perdu depuis le début de l'année le quart de sa valeur et plongeait de nouveau mercredi, le dollar s'envolant au-dessus de 11 hryvnias.

Un accord avec le FMI est d'autant plus crucial que l'Union européenne et les États-Unis en font dépendre leur propre participation à un plan de sauvetage financier.

«Nos partenaires européens ont pris la décision de nous verser 1,6 milliard d'euros. Deux mois après la signature d'un accord avec le FMI, une première tranche pourra être versée», a assuré mercredi M. Iatseniouk, cité par l'agence Interfax Ukraine.

Les États-Unis ont promis de leur côté un milliard de dollars de prêts garantis à Kiev, et le Japon 1,5 milliard de dollars.

Une mission de la Banque mondiale se trouve par ailleurs à Kiev depuis lundi. Elle s'est dite prête à verser jusqu'à trois milliards de dollars à l'Ukraine pour des projets de développement.

La semaine dernière, l'ambassadeur de France à Kiev, Alain Rémy, a averti qu'une aide financière aurait peu d'effet pour redresser l'économie sans lutte contre la corruption qui gangrène le pays et fait fuir les investisseurs étrangers.

«Nous avons dépensé trop d'argent pour rien en Ukraine avec des partenaires qui prenaient l'argent et ne jouaient pas le jeu de la coopération», a expliqué le diplomate.

L'Ukraine pourra s'approvisionner en gaz dans l'UE

L'Ukraine, très dépendante du gaz russe, pourra s'approvisionner en cette matière dans l'Union européenne, a indiqué mercredi le commissaire européen au Budget Janusz Lewandowski.

«Nous nous sommes entendus sur le fait qu'il y aura la possibilité de faire passer en Ukraine le gaz en provenance de Slovaquie et ensuite de Pologne et de Hongrie», a déclaré M. Lewandowski à l'agence polonaise PAP à Kiev.

«C'est un premier accord très important pour la sécurité», a estimé le commissaire qui a participé mercredi à une réunion avec le gouvernement de transition ukrainien.

Le gaz importé de Russie représente la majorité de la consommation de l'Ukraine. En 2006 et 2009, les conflits entre Kiev et Moscou ont conduit à des perturbations des livraisons du gaz russe vers les pays de l'Union européenne.

Cette année, Gazprom a déjà menacé de suspendre ses livraisons si Kiev, en grandes difficultés financières, ne réglait pas ses arriérés de paiement qui se sont accumulés ces derniers mois.

Les deux pays négocient actuellement le prix du gaz qui s'appliquera à partir du 1er avril et les autorités russes ont fait savoir qu'elles comptaient mettre fin à tous les rabais appliqués à Kiev, y compris celui lié à l'utilisation de la base navale de Sébastopol en Crimée, désormais rattachée à la Russie.

Le gouvernement ukrainien a prévenu mardi la Russie qu'il refuserait d'importer son gaz au prix qu'elle demande.

Kiev s'est résolue mercredi à une drastique et impopulaire hausse des prix du gaz pour les ménages afin d'obtenir une aide financière du FMI permettant au pays d'échapper à la faillite.