Européens et Américains ont conclu vendredi à Washington le 3e round de leurs négociations commerciales en assurant qu'un accord de libre-échange ne serait pas synonyme d'une «dérégulation» généralisée de part et d'autre de l'Atlantique.

«La dérégulation n'est pas et ne sera pas un objectif du TTIP», l'accord commercial transatlantique, a déclaré à Washington le négociateur en chef européen, Ignacio Garcia Bercero, à l'issue du 3e round de discussions.

Son homologue américain Dan Mullaney a, lui, insisté sur le fait que les discussions visaient avant tout à l'éliminer «des divergences inutiles» de part et d'autre de l'Atlantique et éviter des redondances dans des contrôles sanitaires ou sur des normes de sécurité automobile.

Depuis juillet, Européens et Américains sont engagés dans de vastes négociations commerciales visant à créer l'une des plus importantes zones de libre-échange sur le globe, dans l'espoir de doper leurs économies. Le prochain round doit avoir lieu en mars à Bruxelles.

«Nous restons sur les rails pour parvenir à un accord ambitieux», a estimé M. Garcia Bercero.

Les tarifs douaniers étant faibles de part et d'autre de l'Atlantique, l'essentiel des discussions portent sur les barrières réglementaires qui freinent les échanges, soulevant des inquiétudes de la société civile.

Lundi, lors du coup d'envoi de ce nouveau round de discussions, l'ONG américaine Public Citizen avait ainsi exprimé la crainte que l'accord ne se fonde sur «le plus petit dénominateur» pour établir des réglementations communes.

Les craintes sont particulièrement vivaces s'agissant de l'agriculture et notamment des OGM, strictement encadrés en Europe mais cultivés à grande échelle aux États-Unis.

«Ces négociations ne consisteront pas à abaisser ou renier les standards les plus élevés de protection pour les consommateurs, l'environnement, la vie privée, la santé et le droit du travail», a répondu M. Garcia Bercero lors d'une conférence de presse.

La transparence en question

Selon les deux parties, de nombreux thèmes ont été abordés au cours de la semaine, allant des matières premières aux droits de la propriété intellectuelle en passant par les appels d'offres publics. Mais les points précis en discussion n'ont pas été dévoilés, alimentant là encore des critiques sur l'absence de transparence.

Tout en assurant rechercher à «maximiser la transparence», M. Mullaney a affirmé qu'il fallait donner aux négociateurs l'espace nécessaire pour «avoir des discussions franches».

Seule certitude avancée par son homologue européen: la protection des données privées sur Internet, question sensible depuis le scandale de l'espionnage américain, ne sera pas intégrée dans les négociations commerciales.

M. Garcia Bercero a, au passage, espéré que les entreprises européennes auraient «la garantie» de pouvoir accéder au marché énergétique américain, en plein boom grâce au gaz de schiste.

Les deux négociateurs se sont également efforcés de déminer une autre controverse sur le mécanisme de protection des investisseurs qui sera intégré dans le futur accord de libre-échange.

Dans une lettre publiée lundi, environ 180 ONG et syndicats ont dit craindre que ce mécanisme ne porte «atteinte au processus démocratique», en permettant aux entreprises de contester en justice des mesures prises par les États pour protéger l'environnement ou la santé publique.

«Nous prenons ces inquiétudes très au sérieux», a affirmé M. Garcia Bercera, ajoutant que le mécanisme devra être défini «le plus précisément possible» pour éviter toute interprétation «arbitraire».

Le négociateur américain a pour sa part affirmé que les États-Unis ne «transigeraient jamais» avec le droit des États à agir dans l'intérêt de leur population.

Pour la première fois depuis le lancement des discussions, les négociateurs n'ont en revanche pas eu à répondre aux questions sur le scandale de l'espionnage américain qui a menacé de faire dérailler le processus lors des deux précédents rounds, en juillet et à la mi-novembre.

Selon ses promoteurs, un accord de libre-échange américano-européen permettrait de doper l'économie de part et d'autre de l'Atlantique. Il pourrait rapporter quelque 119 milliards d'euros (175 millions $CAN) par an à l'UE, et doper ses exportations vers les États-Unis de quelque 28%, selon une étude britannique citée par la Commission.