L'Espagne, plongée en récession depuis deux ans, en est sortie au troisième trimestre avec une croissance de 0,1%, a annoncé mercredi la banque centrale, reflétant le léger mieux observé en Europe, toutefois insuffisant pour relancer emploi et consommation.

Cette hausse du produit intérieur brut (PIB) survient «après neuf trimestres consécutifs de baisse», rappelle la Banque d'Espagne, dont les estimations sont généralement confirmées par les données officielles, attendues le 30 octobre.

La quatrième économie de la zone euro, frappée doublement en 2008 par l'éclatement de sa bulle immobilière et le démarrage de la crise financière internationale, connaît sa deuxième récession en cinq ans.

Mais «au troisième trimestre, l'économie espagnole a poursuivi son amélioration graduelle que l'on observe depuis le début de l'année, dans un environnement caractérisé par une certaine détente des tensions financières et une amélioration de la confiance», assure la banque centrale, expliquant que la reprise est stimulée par les exportations.

«Le pire est passé», a réagi dans une note l'analyste Holger Schmieding, de la banque Berenberg, qui souligne qu'«un à un, les pays en crise en zone euro renouent avec la croissance après une récession extrêmement forte».

Le retour au vert de l'Espagne «survient après les bonnes nouvelles venant de Grèce, d'Irlande et du Portugal, qui avaient déjà recommencé à croître au deuxième trimestre», avec des rythmes respectifs de 0,6%, 1,1% et 0,4%, rappelle-t-il, prévoyant une sortie de récession de l'Italie au quatrième trimestre au plus tard, voire dès le troisième.

En zone euro, «la reprise va se consolider peu à peu», mais elle sera «seulement modeste, fragile et sujette à la rechute», prévient la Banque d'Espagne.

Les dettes publiques et privées demeurent très élevées, la réduction des déficits publics reste la priorité et les conditions financières sont toujours strictes, limitant les crédits aux particuliers et entreprises: trois facteurs qui, selon l'organisme, pourraient miner la croissance future.

reprise très modeste

En Espagne, la reprise sera particulièrement modeste, avec un PIB qui devrait baisser de 1,3% cette année puis remonter de 0,7% en 2014, anticipe le gouvernement.

«Nous nous attendons à ce que le désendettement privé, les conditions financières strictes et l'ajustement en cours dans le secteur immobilier continuent à limiter toute croissance économique significative en Espagne dans les prochaines années», prédisent les analystes de Citi.

Elle ne sera pas la seule à connaître une faible croissance.

«Les bases d'une reprise solide et de long terme ne sont pas encore réunies», écrit l'agence Standard & Poor's à propos de la France, elle aussi sortie de récession. En cause notamment, un chômage élevé et des exportations trop timides.

L'emploi reste en effet le grand chantier à améliorer: en Espagne, si la banque centrale relève que la destruction d'emplois au troisième trimestre a été la plus faible «depuis le début de la crise», le taux de chômage reste cependant proche de son record historique (26,3% au deuxième trimestre).

Selon elle, «les perspectives toujours défavorables du marché du travail» empêcheront une reprise de la consommation à court terme.

Si le gouvernement assure que le pays recommencera à créer de l'emploi au second semestre 2014, les analystes sont sceptiques: «la création nette d'emplois ne surviendra pas en Espagne avant 2016», calculait récemment Moody's Analytics.

«Nous doutons que l'économie puisse générer une croissance assez forte pour baisser de manière significative le taux de chômage et la dette publique dans les deux prochaines années», estime aussi Ben May, de Capital Economics.

Le gouvernement lui-même n'attend qu'une faible baisse du chômage, de 26,6% fin 2013 à 25,9% en 2014.

Même pessimisme pour la zone euro, qui devrait retrouver la croissance au troisième trimestre, avec un PIB attendu en hausse de 0,1% par les instituts européens Insee (France), Ifo (Allemagne) et Istat (Italie).

Malgré ce redémarrage, «le marché du travail ne s'améliorerait que de façon limitée» d'ici début 2014 et «le pouvoir d'achat resterait atone», préviennent ces instituts.