Le divorce entre le géant américain de la distribution Walmart et son partenaire indien, nouvelle alliance avortée d'un étranger avec un groupe local, va refroidir un peu plus les ardeurs des investisseurs étrangers en Inde, selon les analystes.

Le premier distributeur mondial a annoncé mercredi avoir mis un terme à sa coentreprise avec le conglomérat Bharti et levé le pied sur ses projets d'ouvrir des supermarchés en Inde, marché de 1,2 milliard de personnes.

La corruption rampante, la lourdeur de la bureaucratie, les hésitations du gouvernement à ouvrir le marché aux étrangers, les différends fiscaux et le ralentissement de la croissance sont autant de freins à l'investissement étranger, selon les analystes.

La décision de Walmart «va refroidir un peu plus les ardeurs», a dit Saloni Nangia, présidente du cabinet de consultant Technopak, à l'AFP.

«En termes de perspective de marchés, les entreprises veulent être en Inde. Mais du point de vue des affaires et en termes de stratégie, c'est différent», ajoute-t-elle.

«Le gouvernement doit rendre ce pays attractif pour les investissements. Jusque-là, cela n'a été qu'une posture», dit-elle.

Plusieurs alliances entre partenaires indiens et étrangers ont déjà échoué, relève l'analyste.

«Ce peut être dû à des attentes contradictoires, des rendements décevants, des hésitations gouvernementales, des problèmes réglementaires et judiciaires et quelques fois un mélange de tous ces éléments», ajoute-t-elle.

Beaucoup d'entreprises étrangères avaient de fortes attentes en termes d'ouverture du marché indien, notamment depuis l'an dernier dans la distribution, mais elles se sont heurtées aux problèmes d'infrastructure, de délais, de bureaucratie.

La corruption, obstacle majeur

«Aucune entreprise ne peut opérer sans graisser la patte de quelqu'un ici ou sortir des enveloppes non prévues», dénonce l'Economic Times dans un éditorial.

Le problème de la corruption prend une importance accrue, notamment pour les groupes américains qui sont susceptibles de tomber sous le coup de la loi américaine en cas de corruption à l'étranger.

«La corruption est l'un des défis les plus cruciaux pour l'économie indienne», abonde Tobu Latta, responsable du cabinet Control Risks en Asie-Pacifique.

Walmart a expliqué que les règles d'approvisionnement pour ouvrir un supermarché en Inde lui posaient des difficultés. Mais le groupe y est aussi visé par une enquête sur un prêt accordé à son partenaire Bharti et doit aussi faire face à des soupçons de corruption, ce qu'il dément.

De son côté, le groupe de télécoms norvégien Telenor a mis fin l'an dernier à son partenariat avec l'indien Unitech après la Court suprême indienne eut annulé l'octroi de 122 licences de téléphonie mobile accordées par un ex-ministre soupçonné de malversations.

L'opérateur mobile des émirati Etialsat a mis fin à son activité en Inde et s'est également séparé de son partenaire local DB Group après cette même décision de la justice, le groupe accusant en outre DB de fraude. Etialsat n'envisage de revenir que «dans un cadre juridique et réglementaire plus clair».

Dans l'automobile, Fiat a mis fin l'an dernier à son partenariat pour la distribution avec le géant Tata Motors parce qu'il ne générait pas de ventes suffisantes.

Pour les analystes, la perspective des élections législatives du printemps 2014 est peu propice à une évolution du cadre législatif favorisant l'arrivée d'investissements étrangers.

Nombre de dirigeants politiques sont hostiles à l'investissement étranger, estimant qu'il menace l'emploi, en particulier dans la distribution dominée par le petit commerce familial.