Contraintes financières et problèmes de légitimité: la Banque mondiale et le FMI, qui ont tenu leur assemblée générale cette semaine à Washington, sont confrontés à des défis de taille à un an de leur 70e anniversaire.

Tous les yeux étant braqués sur la crise budgétaire américaine, le grand raout a épargné au Fonds monétaire international (FMI) un nouveau débat épineux sur les effets néfastes de l'austérité qu'il applique notamment dans la zone euro.

Mais le FMI a été une nouvelle fois montré du doigt pour son manque de représentativité: depuis plusieurs années, les pays émergents clament que leurs droits de vote dans l'institution ne reflètent plus le réel état du monde.

À l'heure actuelle, la Chine pèse à peine plus lourd que l'Italie au sein du FMI, qui a par ailleurs toujours été dirigé par un Européen depuis sa création en 1944.

Une réforme de la gouvernance est dans les tuyaux depuis trois ans mais son entrée en vigueur est bloquée par le veto de fait des États-Unis qui doivent la faire ratifier par le Congrès. La patronne du FMI, Christine Lagarde, n'a pu que constater son impuissance en déplorant mercredi une nouvelle fois qu'un «important membre» manquait à l'appel.

«Nous devons être plus représentatif et refléter (les) changements» dans l'économie mondiale, a-t-elle insisté vendredi, mais elle n'a toutefois aucun moyen de tordre le bras de son premier actionnaire.

«Cela pose un vrai problème de crédibilité et cela montre que l'institution est obsolète», explique à l'AFP Jacob Funk Kirkegaard, chercheur au Peterson Institute de Washington.

Les grands pays émergents des Brics, qui bouillent d'impatience, ont amorcé leur contre-attaque en annonçant la création de leur propre fonds monétaire qui devrait être finalisé courant 2014, a précisé vendredi le gouverneur de la Banque centrale brésilienne.

«Chine et Inde ne peuvent plus accepter d'avoir une voix aussi faible. C'est aussi une question de survie pour le FMI», décrypte Nicolas Mombrial, responsable d'Oxfam à Washington.

En dépit des critiques, le FMI a encore de beaux jours devant lui: actuellement associé à quatre plans de sauvetage en zone euro, il reste au centre de l'échiquier économique mondial pour son rôle de gardien de l'orthodoxie budgétaire.

«Réductions d'effectifs»

Mastodonte du développement, la Banque mondiale est elle confronté à des défis plus urgents. Arrivé à la tête de l'institution en juillet 2012, Jim Yong Kim a amorcé un recentrage vers la lutte contre l'extrême pauvreté et encouragé une vaste réorganisation interne pour lutter «contre la bureaucratie» et la «culture de la peur» de ses équipes.

«Une institution dédiée au développement ne peut pas être opérationnelle quand ses clients sont désorientés» par son organisation, a-t-il ajouté.

L'institution fait par ailleurs face à la concurrence de nouveaux acteurs du développement (secteur privé, Chine, fondations), qui menacent de lui tailler des croupières en Afrique, et doit convaincre dans les prochains mois ses États membres de remettre la main au portefeuille pour réapprovisionner sa branche dédiée aux pays pauvres (IDA).

«Les principaux pays donateurs veulent que leur argent aboutisse à davantage de résultats», assure M. Kierkegaard.

Le «docteur Kim» a également annoncé un vaste plan d'économies de 400 millions de dollars pour ramener le budget de fonctionnement annuel de l'institution à 4,6 milliards de dollars dans trois ans.

Les économies devraient être centrées sur les frais de voyage et immobilier mais les quelque 10 000 employés de la Banque dans le monde ne seront pas indemnes. «Il y aura des réductions d'effectifs», a prévenu M. Kim, qui prend le risque de bousculer ses équipes.

Cette nouvelle stratégie tous azimuts a reçu le soutien explicite des États-Unis vendredi mais risque de se heurter à l'opposition d'autres États membres.

«La question qui se pose est cruciale: comment s'assurer d'être plus flexible sans régresser sur les standards de qualité? Il va y avoir un vrai débat au sein des États membres», résume Nicolas Mombrial.