La stabilité financière dans le monde reste sous la menace d'un changement de cap de la politique monétaire aux États-Unis et de l'endettement massif des pays riches, a estimé le FMI mercredi.

Dans un premier rapport, le Fonds monétaire international se penche sur la question qui devrait dominer son assemblée générale cette semaine à Washington et qui agite les marchés depuis plusieurs mois: la réduction imminente des injections de liquidités de la Réserve fédérale (Fed).

Cette échéance, encore incertaine, a déjà alimenté pendant l'été une chute brutale de l'afflux de capitaux dans les pays émergents, faisant plonger leur monnaie et les privant d'une source cruciale de financement.

Ces évènements «mettent en lumière des nouvelles inquiétudes pour la stabilité financière», a averti mercredi José Vinals, directeur du département des marchés financiers au Fonds.

Ce ne pourrait être que le début, selon le FMI. «Les anticipations d'abandon progressif de la politique monétaire accommodante aux États-Unis pourraient (...) révéler des zones d'excès financier et de vulnérabilité», indique son rapport semestriel sur la stabilité financière mondiale.

Les pays émergents, qui ont ces dernières années attiré quantité d'investisseurs en quête de rendements élevés, pourraient se retrouver en mal de liquidités à mesure qu'un mouvement de relocalisation s'opère vers les États-Unis.

Selon une récente étude du lobby bancaire international (IIF), les flux de capitaux vers les pays émergents devraient ainsi fondre cette année de 12,6% par rapport à 2012.

Certains États et entreprises pourraient dès lors avoir plus de mal à se financer, d'autant que les «fondamentaux» économiques de ces pays se sont dégradés (inflation, ralentissement de la croissance...), note le FMI.

Selon le Fonds, l'Indonésie, la Turquie, les Philippines, la Turquie ou le Brésil seraient les plus exposés et verraient leur coût de financement flamber en cas de nouvel assèchement de capitaux.

Indirectement mise en accusation, la Fed a défendu sa politique en assurant mi-septembre que son objectif --raffermir l'économie américaine-- serait la «meilleure chose» qui pourrait arriver aux pays émergents.

La transition monétaire n'est d'ailleurs pas dénuée de risques pour les États-Unis eux-mêmes, où la remontée des taux d'intérêt à long terme pourrait renchérir le coût de financement de l'État et freiner le crédit. «C'est un défi politique majeur», résume le Fonds.

«Pic historique» de la dette

Dans un second rapport publié mercredi, l'institution pointe un autre risque pour la stabilité financière: l'endettement des États.

En moyenne, la dette publique des pays développés devrait atteindre le «pic historique» de 110% de leur produit intérieur brut en 2014, soit 35 points de plus qu'en 2007, écrit le Fonds dans son rapport sur la surveillance budgétaire.

«En dépit des progrès sur la réduction des déficits, les fragilités budgétaires profondes restent élevées dans les pays développés», indique le rapport.

Avec un ratio de dette/PIB de 242,3% prévu en 2014, le Japon devrait encore figurer en tête du peloton des pays développés les plus endettés, suivis par la Grèce (174%), l'Italie (133,1%) et le Portugal (125,3%).

Les États-Unis, paralysés par une impasse budgétaire, devraient eux voir leur endettement progresser à 107,3% de leur PIB en 2014, loin devant la France et ses 94,8%.

Face à cette situation, le FMI s'aventure sur un terrain qui lui est peu familier en jugeant «possible» de faire davantage contribuer les plus fortunés et les multinationales à la réduction des déficits.

«Il semble exister une marge suffisante dans beaucoup de pays avancés pour tirer davantage de recettes des plus hauts revenus», souligne l'institution.

Plus globalement, le Fonds s'inquiète de voir «un système fiscal sous tension» qui favorise la concurrence entre États et permet aux contribuables aisés et aux multinationales d'alléger leurs impôts.

Sur les seuls États-Unis, le Fonds retient une estimation de 60 milliards de dollars de recettes qui seraient perdus chaque année du fait des techniques d'optimisation fiscale des multinationales, un sujet qui a récemment retenu l'attention des pays du G20.