Le nouveau gouverneur de la Banque centrale indienne (RBI), Raghuram Rajan, a créé la surprise vendredi en relevant son principal taux d'intérêt afin d'endiguer l'inflation, une décision qui a refroidi la Bourse de Bombay.

Deux jours après la décision surprise de la Fed de maintenir sa politique monétaire accomodante, qui a soulagé les marchés, l'ancien chef économiste du Fonds monétaire international (FMI) a pris à contre-pied les investisseurs en relevant d'un quart de point à 7,50 % son principal taux d'intérêt afin de calmer les fortes tensions inflationnistes.

«Ramener l'inflation à des niveaux plus supportables justifie de relever le taux repo de 25 points de base immédiatement», a estimé le gouverneur dans un communiqué.

Les analystes s'attendaient à un maintien des taux d'intérêt, en dépit d'une hausse surprise de l'inflation en août (+6,10 % sur un an) à son plus haut niveau depuis six mois. Le gouvernement et les milieux patronaux plaidaient eux pour une baisse des taux afin de relancer une croissance au ralenti.

La Bourse de Bombay a accéléré sa chute après cette annonce et perdait 2,55 % à 20.119,93 points. La roupie, qui avait bondi jeudi après la décision surprise de la Réserve fédérale américaine, reculait face au dollar à 62,41 roupies, contre 61,77 jeudi soir.

La devise indienne a connu plusieurs mois de chute jusqu'au début septembre, notamment en raison du ralentissement de la croissance et de la fuite de capitaux, avant de se ressaisir depuis 4 semaines.

Le patronat indien a regretté la décision de la banque centrale.

«Nous comprenons la nécessité pour la RBI de trouver un équilibre entre inflation, croissance et monnaie. (Mais) L'industrie aurait apprécié une baisse du taux directeur», a réagi la CII (confédération de l'industrie indienne), association patronale indienne, dans un communiqué.

«Retour à la normale»

En parallèle, le nouveau gouverneur a allégé certains mesures de resserrement monétaires prises en juillet par la RBI pour endiguer la chute de la devise. L'un des ratios imposé aux banques pour leurs dépôts auprès de la banque centrale, le CRR quotidien, a été abaissé de 99 % à 95 %  et l'un des taux de refinancement (le MSF) des banques abaissé de 75 points de base.

«Maintenant, la situation revient à la normale. Il utilise les taux pour un objectif d'inflation et cela va permettre à la roupie d'évoluer normalement», a estimé Daniel Martin économiste de Capital Economics, en référence aux mesures de juillet qui avait provoqué une évolution erratique des taux.

Rajan, qui jouit d'une réputation flatteuse en Inde, doit affronter une situation compliquée entre persistance de l'inflation, croissance en berne mais également dégradation de la balance des comptes courants sous l'effet de la chute de la devise.

Le produit intérieur brut de la troisième économie d'Asie n'a augmenté «que» de 5 % sur l'année budgétaire 2012/13 (clos le 31 mars), son taux le plus faible depuis dix ans. Sur le premier trimestre de l'exercice en cours, la croissance a encore ralenti, à 4,4 %.

Le nouveau gouverneur a souligné que la décision de la Fed de ne pas restreindre dans l'immédiat ses injections de liquidités n'était qu'un «report». «Nous devons utiliser ce délai pour créer une situation financière résistante et mettre au point un programme pour la croissance» a dit M. Rajan.

L'Inde souffrait depuis le printemps d'un mouvement de départ des capitaux vers les États-Unis, les investisseurs anticipant alors une remontée des taux par la Fed.

Lors de son arrivée début septembre, le nouveau gouverneur avait prévenu qu'il n'était pas un magicien et qu'il pourrait prendre des mesures impopulaires pour juguler la crise. Ses premières décisions sur la libéralisation des marchés financiers avaient été saluées et donné un soutien à la roupie.