La France a perdu son dernier triple A après que l'agence de notation franco-américaine Fitch Ratings a décidé vendredi de lui retirer ce sésame accordé aux premiers de la classe comme l'Allemagne, mais ses actifs sont encore considérés comme sûrs.

Paris est désormais rétrogradée à «AA+», soit la deuxième meilleure note dans l'échelle d'évaluation de l'agence de notation mondiale.

À cette note est assortie une perspective «stable», indiquant que Fitch n'envisage pas de la toucher dans «les deux années à venir», est-il précisé dans le texte.

«La production et les prévisions économiques sont nettement plus faibles (...) le taux de chômage a également bondi à son plus haut niveau depuis 15 ans, soit 10,9% en mai 2013», a expliqué Fitch dans un communiqué vendredi.

La France sort définitivement des cercles prestigieux des pays notés triple A. C'est l'agence de notation américaine Standard & Poor's qui l'avait déclassée la première en janvier 2012, suivie quelques mois plus tard, en novembre dernier, par sa rivale Moody's Investors Service. Seule Fitch avait conservé sa confiance totale à Paris.

Cette décision ne devrait pas avoir de grandes conséquences sur les marchés, notamment obligataires où les taux d'emprunt tricolores ne devraient pas s'envoler.

«Le coût de la dette est faible et la France, du fait de son statut d'émetteur de référence de la zone euro, bénéficie d'une flexibilité financière importante», indique d'ailleurs Fitch.

Prenant «acte», le ministre de l'Économie Pierre Moscovici a abondé dans ce sens. «La dette française est parmi les plus sûres et les plus liquides au sein de la zone euro, bénéficiant de taux historiquement bas, preuve de la confiance réaffirmée des investisseurs», a-t-il déclaré.

Divergences de prévisions

Vendredi, le taux auquel emprunte la France à dix ans a reculé à 2,193%, alors même que la rumeur d'une dégradation de la note par Fitch se propageait dans les salles de marché.

Les incertitudes qui planent sur les perspectives de croissance du pays et qui laissent peu de marges de manoeuvre au gouvernement pour atteindre ses objectifs de consolidation budgétaire ont fini par convaincre Fitch de suivre l'exemple de ses rivales.

Elle cite notamment les interrogations persistantes à court et moyen termes sur l'évolution de la production, du chômage et du déficit de l'État. D'autant plus que l'agence souligne avoir des divergences avec le gouvernement français sur les prévisions de croissance.

Fitch prévoit une contraction de l'économie française de 0,3% en 2013 puis une croissance de 0,7% en 2014 et de 1,2% en 2015, alors que l'équipe du président François Hollande table sur une croissance de 0,1% en 2013, 1,2% en 2014 et 2% en 2015 et 2016.

«Cette divergence dans les prévisions explique la différence entre l'estimation du ratio de dette sur PIB réalisée par l'agence et les chiffres officiels», souligne Fitch.

Les différences portent aussi sur les prévisions de déficit budgétaire. Fitch s'attend à ce que le déficit français soit au-dessus de 3% du PIB jusqu'en 2014, avant de diminuer à 1% du PIB en 2017, à la fin du mandat de François Hollande. Le gouvernement socialiste prévoit, lui, un déficit de 2,9% du PIB diminuant à 0,7% à ces mêmes dates.

Fitch dit s'attendre à une reprise de l'économie française plus lente que ne l'indiquent les estimations officielles, en raison de l'atonie de la demande externe, de la détérioration de la compétitivité, du chômage élevé et de la consolidation budgétaire.

L'agence dresse un tableau pessimiste de la situation économique de la France: l'économie française est confrontée, selon elle, à plusieurs difficultés structurelles, en particulier un déclin de la compétitivité et de la rentabilité des entreprises, ainsi que des rigidités «persistantes» dans le marché du travail et celui des biens et services.

Elle donne toutefois un satisfecit à l'équipe Hollande qui a engagé, selon elle, un «ambitieux» programme de réformes depuis son arrivée, dont le Pacte national pour la Croissance, la Compétitivité et l'Emploi.

«Ces mesures pourraient contribuer à améliorer la croissance et le compte courant de la balance des paiements sur le long terme», estime-t-elle, mais «les effets des nouvelles mesures sont difficiles à quantifier et il n'est pas certain que toutes les réformes puissent aboutir».

Autre point positif: l'Hexagone bénéficie d'un niveau d'inflation faible et peu volatil, relève Fitch, et le taux d'endettement des ménages est modéré, tandis que le taux d'épargne est élevé.