Mauvaise surprise pour l'Italie: l'agence de notation Standard and Poor's a abaissé mardi d'un cran sa note souveraine et menacé de la dégrader de nouveau en l'absence de mesures adaptées de la part du gouvernement dirigé depuis deux mois par Enrico Letta.

La note à long terme du pays passe ainsi à «BBB», contre «BBB+» auparavant, et est de nouveau assortie d'une perspective négative: «nous pensons qu'il y a au moins une chance sur trois que la note soit abaissée une nouvelle fois en 2013 ou 2014», prévient S&P dans son communiqué.

L'agence de notation, qui s'était abstenue de toute action lors de la formation fin avril du gouvernement de coalition tripartite de M. Letta, se déclare cette fois inquiète des effets de l'affaiblissement continu de la croissance sur la situation économique et sur la capacité de résistance du pays.

L'agence constate une «nouvelle dégradation des perspectives économiques du pays» dans le sillage d'une décennie de stagnation (en moyenne -0,04%). Elle souligne que «la production de l'Italie au premier trimestre 2013 a été inférieure de 8% à celle du dernier trimestre 2007 et continue de reculer».

S&P précise avoir abaissé ses prévisions de croissance 2013 pour le pays: l'agence table désormais sur un recul de 1,9% du PIB italien et +0,5% en 2014. Des prévisions plus pessimistes que celles tout récemment publiées par le FMI, qui font état de -1,8% et +0,7%.

«Selon nous, la croissance faible découle en grande partie des rigidités des marchés du travail et industriel de l'Italie», explique SP.

L'agence semble aussi douter de la capacité de Rome à tenir ses engagements budgétaires cette année. Selon elle, ils seraient «potentiellement menacés en raison d'approches divergentes dans le gouvernement de coalition sur comment combler un manque de recettes» lié à la suspension d'une taxe immobilière et au renvoi d'une hausse prévue de la TVA.

La perspective pourrait cependant être relevée à «stable» en cas de réformes structurelles du marché du travail, de la production et des services «qui pourraient entraîner l'économie italienne vers un niveau de croissance plus élevé», ou «si d'autres mesures comme des ventes d'actifs importantes ou des privatisations permettaient de réduire de manière substantielle le poids de la dette publique», note-t-elle.

Dans le même temps, l'agence a confirmé la note à court terme «A-2».

Selon des sources du Trésor italien citées mardi soir par l'agence Ansa, la décision de SP a été prise sur des bases déjà «dépassées», qui ne tiennent pas compte des mesures déjà mises en oeuvre par le gouvernement, notamment en matière de remboursement des arriérés de dette publique ou justement des mesures en faveur de l'emploi.

Le jugement sévère de SP devrait cependant accroître la pression déjà forte qui pèse sur le gouvernement Letta, pris en tenaille entre ses engagements de rigueur budgétaire envers l'Europe et les promesses de baisses d'impôts du parti de Silvio Berlusconi, membre de sa coalition. M. Letta s'est déjà vu reprocher à plusieurs reprises ces dernières semaines de repousser des décisions difficiles à après les vacances d'été.

L'agence de notation n'est d'ailleurs pas la seule à se montrer sceptique sur les perspectives de reprise économique dans le pays (à partir du 4e trimestre selon le ministre de l'Économie, Fabrizio Saccomanni).

«Dans ce pays, ce qui est important est de créer de l'emploi (...) Si tout va bien l'année prochaine, nous croîtrons de 0,4% mais nous ne créerons pas d'emploi. Pour cela, il faut croître de 2-3%», a lancé vendredi le président du lobby patronal, Giorgio Squinzi.