La zone euro a fait un nouveau pas jeudi dans l'élaboration de l'union bancaire, en se mettant d'accord sur la recapitalisation directe des banques par son fonds de secours, promis il y a tout juste un an en pleine crise bancaire espagnole.

Réunis à Luxembourg, les ministres des Finances des 17 ont approuvé les grandes lignes de ce mécanisme qui doit «garantir la stabilité de la zone euro» et éviter «une contagion entre crise bancaire et crise des dettes souveraines», selon les termes du président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem.

Ils ont accepté qu'il puisse être utilisé de manière rétroactive, et concerne donc certains pays ayant déjà bénéficié d'un programme d'aide notamment pour renflouer leurs banques en difficulté. Mais cela se fera uniquement «au cas par cas», ont-ils prévenu.

La recapitalisation directe des banques devrait permettre de sauver les banques d'un pays sans peser sur ses finances publiques. Elle ne devrait toutefois pas entrer en vigueur avant mi-2014, quand le dispositif de supervision unique des banques sera opérationnel.

Sur les 500 milliards d'euros (685 milliards de dollars) du Mécanisme européen de stabilité (MES), 60 milliards d'euros (82 milliards de dollars) seront consacrés à la recapitalisation directe des banques. Ce montant pourra être révisé par le conseil des gouverneurs du MES si cela est «jugé nécessaire», a précisé M. Dijsselbloem.

Mais le recours à cet instrument se fera sous conditions. «Si certains pensent qu'il suffit de solliciter le MES quand une banque a besoin d'être recapitalisée, ils se trompent», a prévenu le ministre allemand, Wolfgang Schäuble.

Il faudra d'abord prouver qu'il y a un risque pour la stabilité financière de la zone euro, et surtout explorer d'autres options. En premier lieu, les actionnaires et certains créanciers des banques devront être sollicités.

Si besoin est, les États devront aussi mettre au pot avec une contribution pouvant aller jusqu'à 20% de la somme injectée dans les banques pendant les deux premières années du plan d'aide. Ce ratio sera ensuite ramené à 10%.

«Ce soir, nous avons franchi une étape fondamentale vers l'union bancaire. Demain, c'est la prochaine étape, la résolution des crises bancaires», s'est félicité le ministre français, Pierre Moscovici.

Les 17 seront rejoints vendredi par leurs homologues des 10 autres pays de l'UE pour s'atteler à la mise en place d'un autre pilier de l'union bancaire: les règles pour renflouer ou liquider de manière ordonnée les banques en difficulté en évitant de faire appel à l'argent public.

Les discussions s'annoncent difficiles. Les Européens sont d'accord pour solliciter d'abord les actionnaires, puis les créanciers non assurés, puis le cas échéant les détenteurs d'obligations dits «seniors» et en dernier recours les déposants au-delà de 100 000 euros (137 000$).

Mais la France et le Royaume-Uni défendent une certaine flexibilité. D'autres, comme l'Allemagne, veulent au contraire des règles suffisamment fixes pour éviter les incertitudes.

Si les ministres ne se mettaient pas d'accord vendredi, le processus prendrait trop de retard pour l'adoption d'un texte définitif avant les élections européennes de mai 2014.

En attendant, les ministres des Finances ont adressé jeudi soir un message de fermeté à la Grèce et à Chypre, qui bénéficient tous les deux d'un plan d'assistance financière.

Au moment où le gouvernement de coalition grec est menacé, le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, en a appelé au «sens des responsabilités» des dirigeants du pays.

Aucun accord n'a pu être trouvé jeudi soir entre les trois partis de la coalition sur les suites à donner à la crise de l'audiovisuel public, provoquant une nouvelle crise politique.

Les 17 ont également réagi à la lettre que leur a adressée le président chypriote Nicos Anastasiades, dans laquelle il critiquait vivement le plan de sauvetage du pays qui met selon lui en danger l'avenir de la plus grosse banque de l'île.

«Nous avons rappelé à l'unanimité que la mise en oeuvre du programme d'assistance financière pour Chypre est indispensable», a affirmé M. Dijsselbloem.