Le prix Nobel de la paix Muhammad Yunus, fondateur de la Grameen Bank, banque pionnière dans le microcrédit, a accusé jeudi le gouvernement du Bangladesh de «voler» l'établissement aux pauvres qui bénéficient de ses prêts.

Muhammad Yunus, 72 ans, est en délicatesse avec les autorités de Dacca depuis 2011.

Il avait alors été poussé à la démission au terme d'un long bras de fer juridique, au motif officiel qu'il avait largement dépassé l'âge maximal pour le départ à retraite.

Mais, selon les observateurs, l'influence considérable de la Grameen Bank au Bangladesh, qui a aujourd'hui des activités dans les panneaux solaires, la téléphonie mobile et d'autres biens de consommation, a suscité la convoitise du gouvernement.

Dans une tribune publiée jeudi par tous les grands journaux du pays, Muhammad Yunus estime que la réorganisation de la banque ou sa nationalisation à 51%, proposée par une commission gouvernementale, serait une catastrophe.

«Ce n'est rien d'autre que du vol. S'il vous plaît, n'arrachez la banque des mains des pauvres», écrit-il, dénonçant une «expropriation» pour ses 8,4 millions emprunteurs.

L'État a déjà injecté plus de 130 millions de takas (1,67 million de dollars US) dans la banque pour s'assurer d'autorité 25% de son capital.

La Grameen Bank, fondée en 1983, a prêté plus de 11 milliards de dollars US à des millions de personnes, souvent des femmes très pauvres, qui n'avaient pas accès aux banques traditionnelles. Les prêts consentis, sans intérêt, leur permettent de développer des petites activités commerciales, artisanales ou agricoles.

Les ennuis de Yunus, 72 ans, ont commencé en 2007 lorsqu'il a émis l'idée de créer son propre parti politique, dénonçant une classe dirigeante intéressée par «l'argent et le pouvoir». M. Yunus y avait renoncé au bout de quelques mois. Il s'était ensuite brouillé avec la première ministre Sheikh Hasina.