Des eurodéputés français ont manifesté samedi des inquiétudes concernant l'ouverture prochaine de négociations en vue d'un accord de libre-échange entre l'UE et les États-Unis, malgré l'exclusion de l'audiovisuel du mandat de négociations, obtenue vendredi par la France.

La délégation française du groupe PPE (droite) au Parlement européen s'est «réjouie de cette exclusion», arrachée au nom de l'exception culturelle, dans un communiqué. «C'est une victoire pour tous les défenseurs de la culture européenne», ont souligné Nora Berra et Tokia Saïfi, membres de la commission du Commerce international.

Mais elles ont jugé «fort regrettable que le Conseil ait accepté d'inclure dès à présent la possibilité d'un mandat complémentaire pour inclure les services audiovisuels, ce qui risque de perturber le bon déroulement des négociations»

La France, qui avait brandi la menace d'un veto si l'audiovisuel était inclus dans le mandat de négociations, a obtenu gain de cause. Mais le compromis final auquel sont parvenus les ministres européens du Commerce après 13 heures de discussions prévoit que l'audiovisuel pourra être ajouté à un stade ultérieur dans le mandat confié à la Commission européenne. Il faudra cependant pour cela à nouveau emporter l'unanimité des 27.

Les eurodéputés français du groupe PPE craignent aussi pour le volet agricole des futures négociations, qui devraient être officiellement ouvertes au G8 qui se déroulera la semaine prochaine en Irlande du Nord.

«Les négociateurs doivent se rappeler que, si accord il y a, celui-ci ne saurait remettre en cause le modèle alimentaire européen», mettent-ils en garde.

De son côté, l'eurodéputé Yannick Jadot, porte-parole du groupe des Verts sur le dossier du commerce, regrette «le manque de transparence des négociations internes à l'Union qui ont abouti à ce mandat, et des négociations à venir avec les États-Unis».

«Comment les dirigeants européens peuvent-ils accepter que soient négociés les services publics, les OGM, le boeuf aux hormones, la volaille chlorée, l'agriculture et les indications géographiques, la protection des données privées et la propriété intellectuelle, les marchés publics, les normes environnementales et sanitaires, les droits sociaux, sans que les citoyens aient la possibilité d'accéder au mandat et autres documents de négociation?», s'interroge-t-il.

Pour lui, il est également regrettable que «les fondements du combat pour l'exception culturelle n'aient pas été étendus à tous les champs de la société menacés par cet accord».

La Commission européenne insiste de son côté sur les aspects positifs pour l'économie européenne d'un accord qui créerait la plus vaste zone de libre-échange au monde.

«Je suis ravi que nous ayons désormais un mandat» pour négocier avec les États-Unis, a réagi samedi le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, dans un message vidéo, insistant sur le fait que «renforcer cette relation apportera plus d'emplois et de croissance» dans les deux zones.

«Les gains économiques potentiels pour l'Union européenne sont évalués à environ 120 milliards d'euros par an», soit 545 euros par foyer européen, «presque sans aucun coût». Un tel accord serait ainsi «le plan de relance le moins cher qu'on puisse imaginer», a-t-il souligné.