Le Royaume-Uni risque de vivre une troisième récession en cinq ans... Le pays vient de perdre sa précieuse cote de crédit «AAA» (Moody's), tellement les finances publiques sont mal en point... La livre sterling est en chute libre...

Que fait le gouvernement? Simple, on abaisse les taxes... sur la bière.

«Ça ne règle rien. Mais au moins, ça va calmer la grogne populaire et les tenanciers de pubs qui sont au bord de la faillite», commentait un financier de Londres sur un blogue populaire la semaine dernière.

Certes, cette remarque est teintée d'un grand cynisme fidèle à l'humour britannique. Et certes, chaque semaine au Royaume-Uni, 18 pubs en moyenne ferment leurs portes en pleine crise, menaçant un symbole de la culture anglaise. Reste que le commentaire résume surtout l'amertume qui s'installe au royaume de Sa Majesté.

La semaine dernière, les Britanniques ont dû avaler une autre médecine de cheval du ministre des Finances, George Osborne, qui présentait son quatrième budget depuis l'arrivée de son parti au pouvoir en 2010.

Toujours sous le signe de l'austérité, les mesures comprennent des coupes additionnelles de 3,0 milliards de livres (4,8 milliards CAN) dans l'appareil gouvernemental et un plafond salarial pour les fonctionnaires, tandis qu'on abaisse l'impôt des entreprises.

Une série de mesures qui, à défaut de l'appui populaire, auraient dû rallier les tenants de la rigueur budgétaire. Rien n'y fait.

Coup sur coup, deux bastions de la pensée économique libérale, The Economist et le Financial Times, ont critiqué l'obstination de M. Osborne à persévérer dans l'austérité en période de quasi-récession.

Un échec

Depuis une semaine, plusieurs dénoncent «l'échec» de la politique du gouvernement britannique qui, selon ses détracteurs, est à court de solutions pour relancer la septième économie mondiale.

«Comme attendu, le gouvernement garde obstinément le cap sur l'austérité sans se soucier de la faiblesse de l'économie», déplore l'économiste Vicky Redwood, de Capital Economics, dans une note financière.

Pourtant, le plan initial du gouvernement de David Cameron semblait simple et prometteur. Les compressions budgétaires allaient rééquilibrer les finances publiques, stratégie qui devait requinquer la confiance... et celle-ci, la croissance.

C'est ainsi que Londres allait remettre le pays sur les rails et, du coup, se démarquer des autres pays européens en crise. Or, l'impitoyable politique d'austérité n'a pas plus rétabli la croissance qu'elle n'a assaini les finances de l'État.

En fait, le déficit va se creuser à nouveau cette année. La dette continuera à grimper jusqu'à l'exercice 2017, et le pic sera plus élevé que prévu, à 85,6% du produit intérieur brut (PIB). La prévision de croissance économique cette année est aussi abaissée de moitié, à 0,6%.

Bref, ça ne marche pas.

Patience

Toutefois, M. Osborne s'accroche à son plan. «Ça prendra du temps», a prévenu mercredi le ministre. Il fait valoir aussi que le marché du travail sur l'île britannique est toujours solide avec un taux de chômage parmi les plus faibles en Europe, à 7,8%.

Mince consolation, une mesure du dernier budget a été saluée par plusieurs experts, soit l'effort en faveur de la construction et du logement.

Conformément à la demande des économistes, l'État va profiter de sa capacité à emprunter pas cher sur les marchés pour garantir plus de 133 milliards de livres d'emprunts (200 milliards CAN) dans le secteur immobilier. Une mesure qui plaira aux développeurs et aux jeunes familles qui peinent à s'acheter une maison hors de prix à Londres et ailleurs.

Pour les autres Britanniques, entre-temps, on pourra toujours se désaltérer au pub du coin, s'il est toujours ouvert. La taxe sur la bière, qui avait bondi de 42% depuis 2008, a été abaissée d'un penny et cessera d'augmenter par la suite.

Pour l'amateur de Newcastle ou de Guinness, les largesses de M. Osborne représentent une économie de 4 pennies (!) pour chaque pint par rapport à ce qui était prévu cette année. Que dire d'autre, sauf peut-être «cheers!»

Prévision de croissance économique au Royaume-Uni cette année, qui est ainsi abaissée de moitié.