Logo et slogan porteurs (Vivez l'expérience, Open for Business), chantiers menés dans les temps, missions d'affaires qui se multiplient de Port-au-Prince à Cap-Haïtien... Le désir du gouvernement Martelly de rendre attrayant le pays le plus pauvre de l'Amérique commence à porter ses fruits. Si le président de la République, élu en mai 2011, a essuyé plusieurs critiques face à la lenteur de la mise en place de ses politiques d'affaires et de scolarisation, le vent est en train de tourner.

La semaine dernière, après un an de discussions, Air Transat a annoncé qu'elle offrira des forfaits vacances de Montréal à Port-au-Prince et sur la côte des Arcadins. Trente sièges par mois seront réservés pour cette destination. «Notre but? Avoir un deuxième vol de 189 places en 2014, dit Stéphanie Villedrouin, ministre du Tourisme d'Haïti. On va travailler fort pour que la destination soit sollicitée.»

Le forfait sera annoncé dans les réseaux sociaux, sur les taxis de Montréal et le site internet d'Air Transat. «Air Transat veut vendre Haïti différemment, a indiqué Stéphanie Villedrouin. C'est énorme, car c'est une entreprise crédible. On va ficeler ce produit. Il y aura aussi une grande campagne à Montréal, en janvier.»

Sur le plan touristique, l'annonce d'Air Transat se juxtapose à celle de l'arrivée de grandes chaînes. «Il y a beaucoup d'investissements en ce moment, a affirmé Justin Viard, consul général d'Haïti à Montréal. Marriott ouvre à Port-au-Prince en 2013. Une première. La construction du Best Western se termine bientôt dans la capitale. Royal Oasis vient d'ouvrir ses portes.»

Le gouvernement aimerait voir le nombre annuel de touristes grimper de 300 000 à 1 million, d'ici deux ans. «Actuellement, on reçoit surtout des visiteurs d'affaires et humanitaires, a noté Stéphanie Villedrouin. On veut augmenter les visiteurs de loisir. Le tourisme est un levier économique qui pourra financer bien des programmes sociaux.

«L'image du tremblement de terre ne sort pas de la tête des gens, même si le gouvernement a été très proactif, a ajouté Stéphanie Villedrouin. On ne pense pas tout de suite à la plage, la culture et la gastronomie quand on parle de Haïti. Je suis sûre que, petit à petit, ça va changer. Mais on ne peut le faire seul. Il faut des partenaires stratégiques.»

Haïti's Open for Business

En accédant à la présidence, Michel Martelly a rapidement lancé le slogan Haiti's Open for Business. On mise sur deux axes: le tourisme et les infrastructures. Mais dans les faits, tout est lié. Des aérogares du pays voient leur piste allongée pour être métamorphosées en aéroports internationaux. «Tout le pays est une priorité, a dit Justin Viard. À Jacmel, on prolonge la piste de 700 mètres, au coût de 30 millions de dollars. Aux Cayes également, au coût de 13 millions.»

En novembre, on inaugurait un parc industriel de 246 hectares (Caracol) au nord-est du pays. SNC-Lavalin a participé à son aménagement. «Caracol a été construit en 12 mois, a dit Bernard Chancy, directeur du bureau haïtien de SNC-Lavalin. Je suis assez impressionné de ce qui a été réalisé.»

Le gouvernement incite ses consuls à organiser régulièrement des missions commerciales. En juillet et en novembre derniers, Justin Viard a accompagné une quinzaine d'entreprises en Haïti (GesTek, Koavek, Réseau Fidelis, SNC-Lavalin...). «Le gouvernement a beaucoup de projets, mais les moyens sont limités, a déclaré Justin Viard. Il faut des ponts, des routes et des aéroports. On veut voir comment développer des PPP.»

La prochaine mission aura lieu au lendemain du troisième anniversaire du tremblement de terre du 10 janvier. «J'aurai à effectuer cet exercice tous les trois mois, a indiqué Justin Viard. C'est un gros mandat, mais faisable. C'est la seule façon de sortir de l'assistanat. Haïti a besoin d'investissements et de création de richesse. On offre des avantages incitatifs sur le plan fiscal notamment pour les investisseurs.»

«Le gouvernement a remis en place le Centre des investissements de facilitation (CFI) qui est un one-stop pour les entreprises extérieures et intérieures», a ajouté Stéphanie Villedrouin.

Les entrepreneurs approchés ont-ils en tête la violence, la pauvreté, la maladie, les projets avortés promus par Wyclef Jean, Luck Mervil, la corruption et autres histoires d'imbroglios administratifs quand on les approche? «Je viens toujours avec des statistiques, a répondu Justin Viard. Haïti n'est pas le pays le moins sécuritaire des Caraïbes. Les gens vont se référer à ce qu'on dit dans la presse, mais on parle toujours de Port-au-Prince. Il y a le reste du pays aussi. Ce que les investisseurs entendent et voient, c'est différent.»

«Haïti est sur la voie d'une reconstruction, a soumis Bernard Chancy. Les projets essaient d'être mis en forme efficacement. Il va y avoir du tâtonnement, mais je pense qu'on regarde vers l'avant. Concrètement, il y a beaucoup d'efforts des bailleurs de fonds et du gouvernement pour soutenir les projets de développement et d'infrastructure. C'est important pour SNC-Lavalin de se tenir à jour, se faire connaître plus et faire la promotion de nos services.»

Sur un plan plus romantique, c'est un hibiscus et un soleil qui représentent pour l'instant le mieux les désirs de renouveau d'Haïti! «On n'a pas payé des millions pour cette campagne, a soutenu Stéphanie Villedrouin. C'est la créativité d'un jeune Haïtien qui a gagné, lors d'un concours lancé sur les réseaux sociaux. Ça montre un Haïti chaleureux, ouvert et ensoleillé.

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EN CHIFFRES

Nombre d'habitants: 9,8 millions

Taux de chômage: 60%

Nombre de touristes par an: 300 000

Photo François Roy, La Presse

Justin Viard, consul général d'Haïti à Montréal.