Après avoir exercé des pressions considérables sur plusieurs pays en crise de la zone euro, l'Allemagne tourne son attention, avec inquiétude, vers la France.

Les autorités berlinoises redoutent de voir leur plus important partenaire commercial s'enfoncer dans une crise durable qui serait dommageable pour l'économie allemande et potentiellement fatale pour la monnaie unique.

Ces craintes ont été mises en relief la semaine dernière par une dépêche annonçant que Berlin avait demandé à un groupe d'économistes de haut niveau de plancher sur divers scénarios pour réformer l'économie française.

La nouvelle a été rapidement démentie par le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schaüble, qui a rivalisé d'amabilités avec son homologue français, Pierre Moscovici, lors d'une conférence de presse subséquente pour illustrer la «confiance» régnant entre les deux pays.

Les contorsions diplomatiques n'ont pas suffi à étouffer les réserves allemandes, étalées dans la presse du pays.

L'un des économistes conseillant le gouvernement, Lars Feld, a déclaré récemment que la France était aujourd'hui le «problème le plus sérieux de la zone euro» parce qu'elle «n'a rien entrepris pour vraiment rétablir sa compétitivité».

Le tabloïd Bild a demandé sur un ton alarmiste à la fin octobre si le pays risquait de devenir «la nouvelle Grèce».

« Une forte inquiétude »

Le rédacteur en chef adjoint de la publication populaire à grand tirage, Nikolaus Blome, relève qu'il existe au sein de la classe politique allemande «une forte inquiétude» quant à la capacité du président français «de mettre le pays sur une voie réformiste quelconque».

«Il semble qu'il soit très difficile pour lui de vendre l'idée à sa base politique en raison des promesses faites durant la campagne», souligne le journaliste, qui craint de voir les taux d'emprunt français s'envoler.

Le gouvernement français évoque l'annonce récente d'un crédit d'impôt de 30 milliards d'euros pour les entreprises ainsi qu'une série de compressions et de réformes fiscales devant limiter le déficit du pays pour montrer son sérieux en matière économique, mais la démarche semble trop timorée aux yeux de Berlin.

Le premier ministre français Jean-Marc Ayrault, est venu rencontrer la chancelière Angela Merkel cette semaine en Allemagne pour tenter d'aplanir les divergences existantes. «Nous devons encore plus parler ensemble. La compréhension n'est peut-être pas suffisante en ce moment», a-t-il reconnu.

Le politicien a ajouté à l'intention des critiques que la France «n'a pas de leçons à recevoir».