L'Espagne a encore une fois reculé mardi face à une demande de sauvetage pour son économie, qui n'est pas «imminente», a assuré le chef du gouvernement Mariano Rajoy bien que le pays, où tous les clignotants sont au rouge, ait désormais toutes les cartes en main.

Budget de rigueur 2013, plan de 43 réformes négocié avec Bruxelles, évaluation des besoins des banques: Madrid a désormais franchi les principales étapes avant une demande de sauvetage global.

Mais les divisions en zone euro, les réticences de l'Espagne qui redoute le coût politique et social d'une telle demande, pourraient encore repousser les échéances.

Sur le papier, Madrid peut maintenant solliciter la zone euro à tout moment.

D'autant que pour la quatrième économie de la région, tous les signaux sont au rouge: la dette publique s'emballe et devrait atteindre 85,3% du PIB sur 2012, le déficit vient d'être révisé à la hausse à 7,4% du PIB, loin des 6,3% promis à Bruxelles.

Et les marchés continuent à montrer des signes d'impatience, même si l'Espagne a bénéficié d'une relative détente depuis le mois de septembre, lorsque la BCE a dévoilé des mesures de soutien pour les pays fragiles de la région.

Pour nombre d'analystes, une demande de sauvetage ne serait plus qu'une question de jours. Le début de semaine prochaine semblait même une date butoir, avec une réunion prévue des ministres des Finances de la zone euro le 8 octobre à Luxembourg.

Mais Mariano Rajoy, mardi, a tranché d'un mot. «Non», a-t-il seulement répondu, interrogé par la presse sur l'imminence d'une demande de sauvetage.

La veille pourtant, le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, assurait que la Commission «est prête» à répondre à une demande de Madrid.

Mais l'Espagne, depuis des mois, se refuse à parler de sauvetage, craignant les nouvelles conditions qui pourraient lui être imposées alors que le pays s'enfonce dans la crise, économique et sociale.

Et pour Mariano Rajoy, le risque est de taille sur un terrain politique dangereux: fronde des régions face à l'austérité, poussée nationaliste en Catalogne, scrutin régional au Pays basque, le 21 octobre, où les indépendantistes pourraient faire une nouvelle percée.

En face, la zone euro n'a pas surmonté ses divisions.

«Il y a un débat sur le calendrier. La question est de savoir si c'est la meilleure solution que l'Espagne fasse sa demande d'aide maintenant», soulignait mardi une source diplomatique européenne.

Au plus tard, certains pariaient sur le mini-sommet européen de la mi-octobre, ou sur les derniers jours d'octobre, après les élections basques.

Mais plusieurs diplomates ont évoqué mardi des échéances plus lointaines, courant 2013, pour certains. «Le calendrier est imprécis mais le sommet d'octobre est trop tôt», a affirmé l'un d'entre eux.

«Nous n'avons pas de signaux clairs de l'Espagne», a estimé une source gouvernementale allemande, jugeant peu probable qu'une demande d'aide soit faite d'ici la réunion de l'Eurogroupe le 8 octobre.

En cause: les réticences de plusieurs pays dont l'Allemagne, qui cherche comment gérer au mieux le dossier espagnol et éviter de solliciter le Parlement à chaque décision concernant le sauvetage de la zone euro.

«Les Allemands réfléchissent à aborder cette question en mettant plusieurs dossiers liés à la crise de la dette dans un même paquet», a indiqué ce diplomate, qui ne voit pas d'avancée sur ce point avant la fin de l'année.

L'idée pourrait être de lier la demande d'aide espagnole au plan d'aide chypriote et à la plus que probable nouvelle restructuration de la dette grecque, selon des informations de presse.

«Il faudrait d'abord que les Espagnols se décident pour qu'ils convainquent les gouvernements de l'Eurogroupe. Si les Espagnols eux-mêmes ne sont pas convaincus, ça paraît difficile», a résumé la source gouvernementale allemande.