Le camp du collectif anticapitaliste «Occupy Frankfurt» installé depuis dix mois au pied de la Banque centrale européenne (BCE) à Francfort a été évacué lundi dans le calme par la police, marquant la fin du dernier fief européen de ce mouvement né aux États-Unis.

Assis sous le symbole géant de l'euro ou perchés dans un arbre, les derniers membres du collectif anticapitaliste «Occupy Frankfurt» ont attendu patiemment d'être délogés par les forces de l'ordre.

L'évacuation du campement, autorisée par la justice allemande, a commencé lundi en début d'après-midi. Le square était quadrillé par la police, venue en force, qui interdisait l'accès au site sous les yeux de dizaines de badauds.

Après l'euphorie des débuts, le 15 octobre, quand plus de 5000 militants s'étaient réunis dans la capitale financière européenne, le soufflé du mouvement des «indignés» avait fini par retomber.

Au printemps, la cinquantaine de tentes installées symboliquement au pied de la BCE n'abritait déjà plus qu'une poignée de militants déterminés accompagnés de quelques personnes sans domicile fixe et de gens du voyage.

L'insalubrité du camp, infesté par les rats, était de plus en plus décriée.

La municipalité de Francfort avait donc demandé aux «indignés» de lever leur camp d'ici à fin juillet. Ses occupants avaient saisi le tribunal administratif dans l'espoir de faire annuler cette décision.

Mais lundi, le tribunal a rejeté leur recours, jugeant dans un communiqué que «les tentes, cabanes, sofas, fauteuils, chaises et palettes de bois» rassemblés dans le campement n'étaient pas «des éléments indispensables» pour exprimer leur opinion.

Le site avait déjà été évacué par la police une première fois en mai, de manière provisoire, pour des raisons de sécurité lors de journées de manifestations anticapitalistes dans la capitale financière allemande, qui avaient donné au centre-ville des allures d'état de siège.

«Nous sommes très déçus», a commenté pour l'AFP Maike Wolf, 24 ans, occupante du camp depuis sa création. «La Constitution et le droit de rassemblement sont bafoués» a-t-elle estimé, assurant que le collectif allait continuer à se battre en justice.

«Occupy Frankfurt», comme les autres collectifs dans le monde inspiré du mouvement américain «Occupy Wall Street», milite contre «le pouvoir du capitalisme, de l'argent et des banques». Mais le campement avait fini par perdre de son sens.

Emanuel Rauber, un occupant âgé de 29 ans, relativisait l'évacuation lundi. «Ce n'est pas si mal après tout que le camp soit nettoyé, ça nous permettra de repartir de zéro», pourquoi pas en revenant un jour ou en s'installant ailleurs, dans des maisons vides de Francfort, a-t-il laissé entendre.

«Plusieurs militants étaient d'avis que le camp n'était plus aussi bien ces derniers temps», a-t-il ajouté.

Mais «les sans-abris et les Roms qui vivaient ici vont être mis à la rue», regrette-t-il.

Certains des «indignés» aidaient lundi les policiers à démonter les tentes, tandis que d'autres restaient assis, apathiques ou faisant des percussions sur des bouteilles en verre, regardant les camions-benne emporter matelas et autres sacs-poubelle. En milieu d'après-midi, la majorité des habitants du site avait déjà quitté volontairement le camp, leurs affaires sous le bras.

Il y avait bien un militant pour dénoncer la «dictature» et «l'État policier» alors que disparaissaient les tentes et que la pelouse dégarnie était libérée. Sur une pancarte brandie par un irréductible, on pouvait lire: «nous partirons quand le système sera tombé».

Pendant ce temps, ses compagnons étaient soulevés par les policiers sans opposer de résistance et dirigés vers la sortie.