Les signes inquiétants concernant le Brésil se multiplient: industrie en panne, ventes de détail en baisse, flambée des mauvais crédits, et les autorités qui n'en finissent plus d'intervenir pour relancer l'économie.

Jeudi dernier, la Banque centrale du Brésil a abaissé son taux directeur de 50 centièmes à 8%. Cette huitième détente des taux d'intérêt en 11 mois traduit les difficultés du pays à se remettre en marche.

L'état du géant sud-américain se dégrade rapidement, surtout depuis le dernier Carnaval de Rio de Janeiro en février, laissant les Brésiliens avec un interminable lendemain de veille.

La croissance brésilienne prévue pour 2012 était fixée à 4,5% à la fin du mois de janvier, le gouvernement vient de se raviser pour une énième fois et table sur une hausse de 2,5% (contre 7,5% en 2010). Le consensus des experts tourne autour de 2% seulement, ce qui serait la pire performance depuis 2003.

Dans le peloton de tête depuis 10 ans en termes de croissance, le Brésil s'est hissé au sixième rang des puissances mondiales, devant le Royaume-Uni, grâce à sa richesse minière et agricole et à la forte demande chinoise. La Chine est devenue le premier partenaire commercial des Brésiliens, devant les États-Unis.

Or, les Chinois achètent moins, les prix des matières premières baissent et la consommation - l'autre moteur de l'économie - a nettement ralenti.

Moody's

Stimulés par leur pouvoir d'achat grandissant, les Brésiliens sont devenus de grands consommateurs au fil des ans et semblaient filer le parfait bonheur.

Mais l'agence Moody's a ramené tout le monde sur terre, il y a deux semaines, en abaissant la note de crédit de huit banques brésiliennes. Principale raison évoquée: l'augmentation des mauvais prêts.

Alors que l'encours des crédits a doublé en cinq ans, le taux de créances douteuses en juin dans le secteur de la consommation a atteint 8%. Un indicateur qui se détériore depuis plusieurs mois.

Même si cela demeure «gérable» selon le gouvernement, les banques sont préoccupées et renforcent leurs provisions, a confié le président d'une importante banque locale.

Du côté des entreprises, le taux de créances douteuses s'élève à 4,1%, ce qui porte la moyenne pour l'ensemble des prêts à 6% - un sommet en 12 ans!

Longtemps anémique, le crédit a littéralement doublé depuis 2005, passant de 25 à 50% du PIB.

Toutefois, la consommation a perdu son dynamisme, les ménages ayant trop de dettes à rembourser. Cela se traduit par un repli de 0,8% des ventes de détail en mai - le plus important en trois ans. Les ventes de matériaux de construction ont plongé de 11%.

Plans de relance

De son côté, le gouvernement de Dilma Rousseff multiplie les manoeuvres de réanimation de l'économie.

«Le pays prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger la production et les emplois», disait avec insistance Mme Roussef il y a 10 jours, en présentant un septième plan de relance évalué cette fois à 6,6 milliards de real (3,3 milliards CAN) pour soutenir l'industrie.

Cela s'ajoute à l'aide de 60 milliards de real (30 milliards CAN) annoncée en avril, dont 45 milliards de prêts aux entreprises et d'allégements fiscaux. Sauf que les résultats se font attendre.

Il y a au moins une bonne nouvelle: l'inflation - un problème quasi chronique dans ce pays - a commencé à ralentir, passant sous la barre des 5% en juin.

Ce qui donne une marge de manoeuvre aux autorités, car le Brésil a encore les taux d'intérêt parmi les plus élevés du G20. Sans compter que les taux réels exigés par les banques pour un prêt auto donnent le vertige: 38,8% en moyenne en mai, selon Bloomberg.

D'autres baisses de taux sont donc à prévoir, affirme la banque brésilienne Sulamerica Investimentos.

La nouvelle classe moyenne

On les appelle les «marchés à croissance rapide». Ils sont 25 pays, incluant le Brésil et la Chine. Ils pourraient représenter les trois quarts des emplois mondiaux en 2020 et plus de la moitié de l'activité de la planète, estime Ernst&Young.

Leur économie a certes «sensiblement ralenti» en 2012, reconnaît l'entreprise. Mais ce repli sera de courte durée, car ces pays deviennent de plus en plus riches.

Dans ce «top 25», le nombre de ménages ayant un revenu annuel de plus de 30 000$US va plus que doubler d'ici 2020. Il passera à quelque 149 millions de foyers, un chiffre supérieur à celui des États-Unis (120 millions) et de la zone euro (116 millions). Le balancier du pouvoir économique va donc basculer complètement.

Il faudrait bien revoir un jour la liste des soi-disant «pays riches»...