Durant la crise de la dette souveraine, les marchés financiers ont eu les yeux rivés sur la Grèce, le Portugal, l'Irlande, qui ont eu besoin d'une bouée de sauvetage pour ne pas couler avec leurs dettes.

Mais la France, pourtant considérée comme un pays stable, pourrait se retrouver au centre de la prochaine crise financière européenne, selon l'hebdomadaire anglais The Economist.

La France est prise entre plusieurs feux. Prise entre la jeunesse sacrifiée et les travailleurs plus âgés qui ne veulent pas faire de sacrifice. Prise entre la gauche et la droite qui se radicalisent. Prise entre la nécessité d'assainir les finances publiques et celle de ramener la croissance économique.

Récemment, le Fonds monétaire international, l'OCDE et la Commission européenne ont exhorté la France à prendre des mesures plus radicales pour stimuler son économie, la deuxième de la zone euro et la cinquième au monde.

À 10%, le taux de chômage n'a jamais été aussi élevé depuis la fin des années 90. Il est même supérieur à celui de l'Italie (8,6%).

Comme dans bien d'autres pays européens, le taux de chômage des jeunes (18-24 ans) est encore plus élevé. Près du quart des jeunes Français (23%) se cherchent du boulot. Et ceux qui ont la chance de dénicher du travail doivent se contenter d'un contrat de courte durée qui représente 90% des emplois offerts aux jeunes.

Le marché de l'emploi divise donc la population entre une génération plus jeune incapable de trouver du travail et une génération plus âgée protégée par un droit du travail rigide», souligne Pierre Fournier, analyste géopolitique à la Financière Banque Nationale.

Si l'économie française tourne au ralenti, c'est en bonne partie à cause de la baisse de sa compétitivité, notamment face à l'Allemagne. Dans le secteur industriel, 350 000 emplois ont disparu depuis l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy. La France est aujourd'hui l'un des pays les moins industrialisés d'Europe, devançant seulement le Luxembourg et la Grèce, indique M. Fournier.

Les exportations pâtissent. Depuis 12 ans, la France perd du terrain. En 1999, ses exportations hors de la zone euro représentaient 18,5% des exportations de l'euro. En 2011, sa part avait fondu à 13%. Le pire recul de tous les pays, souligne la Société Générale.

Les Français comptent trop sur l'État pour soutenir l'économie», estime M. Fournier. Les dépenses publiques forment 56% de leur produit intérieur brut (PIB), contre 48% dans la zone euro et 43% dans les pays de l'OCDE.

Il devient essentiel que la France réduise les dépenses de l'État», dit M. Fournier. Il faut dire que la France affiche un déficit chronique depuis 1974. À ce rythme, la dette publique atteindra 100% du PIB d'ici 2015-16, a prévenu le vérificateur général de la France.

Mais la diète n'est pas une recette gagnante pour des élections. Les deux candidats ont promis de ramener l'équilibre budgétaire, d'ici 2016 ou 2017... mais ni l'un ni l'autre n'ose dire par quel moyen.

Pendant ce temps, la gauche et la droite se radicalisent. Appuyé par la jeunesse déçue, le Front national de Marine Le Pen veut abolir l'euro et reconstruire l'industrie française en érigeant des douanes. À l'autre bout du spectre, le Front de gauche veut relever le salaire minimum à 2200$ par mois, plafonner les salaires à 470 000$ et interdire aux entreprises rentables de supprimer des emplois.

Les deux partis politiques cachent la situation sous le tapis. On ne ressent pas l'urgence de la situation en France. Mais on a vu que lorsque les marchés financiers commencent à exiger des réformes, le pays n'a plus le luxe de prendre son temps», avertit Marc Christopher Lavoie, gestionnaire chez Hexavest. «Il y a une crise financière qui va survenir en France. C'est insoutenable», dit-il.

Mais pour l'instant, la France est dans le déni, comme l'illustre la couverture du magazine The Economist qui présente François Hollande et Nicolas Sarkozy causant avec nonchalance aux côtés d'une femme nue... dans une version revue et corrigée du Déjeuner sur l'herbe de Manet!