La zone euro restait soumise à de fortes tensions vendredi, en particulier sur le marché de la dette, après la sanction infligée par Standard and Poor's à l'Espagne, une décision qui intervient en plein débat sur l'impact des mesures d'austérité sur la croissance.

La fragilité de la situation espagnole était patente, avec un retour à la récession, mais l'annonce jeudi soir de la dégradation de la note du pays de deux crans, de «A» à «BBB+», est venue renforcer les inquiétudes sur la capacité à redresser la barre du pays qui fait aussi face à un chômage record (plus de 24%).

Cet abaissement s'est aussitôt répercuté à la hausse sur les taux auxquels les États empruntent pour refinancer leur dette. L'Italie, qui a emprunté vendredi près de 6 milliards d'euros, a dû faire face à une montée des taux.

La dégradation de la note espagnole «n'est pas totalement une surprise mais elle pèse sur le moral des marchés en zone euro, puisqu'elle s'ajoute à une série d'événements négatifs», a estimé Kintai Cheung, économiste chez Crédit Agricole CIB.

Elle vient en effet s'ajouter aux incertitudes politiques notamment en France, avec la présidentielle où le candidat socialiste, François Hollande, est arrivé en tête au premier tour.

Cette dégradation intervient également au moment où responsables économiques et politiques s'interrogent sur la manière dont les déficits peuvent être réduits dans un contexte économique déprimé, avec un recul du PIB attendu de 0,3% en 2012 en zone euro, selon le FMI.

Chômage

Le chômage a encore augmenté en Espagne pour atteindre 24,4% de la population active au premier trimestre contre 22,9% au dernier trimestre de l'année dernière.

Ces chiffres publiés vendredi révèlent l'ampleur de la crise dans le pays.

Avec près d'un actif sur quatre frappé, l'Espagne connaît le taux de chômage le plus élevé des 17 pays de la zone euro.

D'après l'Institut national de la statistique, 365 900 Espagnols ont perdu leur emploi au cours des trois premiers mois de 2012 et le nombre de chômeurs s'établit désormais à 5,6 millions.

Chez les moins de 25 ans, le taux de chômage dépasse à présent les 50%, à 52% contre 48,5% au dernier trimestre 2011.

«Ce sont des chiffres terribles pour tout le monde et terribles pour le gouvernement», a commenté le ministre des Affaires étrangères José Manuel Garcia-Margallo sur la radio nationale espagnole.

Risque nul de défaut

Standard and Poor's estime par ailleurs «qu'il y a une probabilité nulle de défaut de paiement» de l'Espagne.

C'est ce qu'a assuré vendredi Myriam Fernandez de Heredia, directrice des notations souveraines de l'agence pour l'Afrique et l'Europe.

«Une note de la catégorie BBB, dans la partie haute de la catégorie comme c'est le cas de l'Espagne, est une note dans la catégorie d'investissements, ce qui signifie, si nous regardons nos études, que réellement (...) il y a une probabilité nulle de défaut de paiement», a-t-elle déclaré, lors d'une conférence téléphonique, au lendemain de la décision de cette agence d'abaisser de deux crans la note de l'Espagne, de A à BBB+.

Standard and Poor's avait déjà abaissé en janvier la note de solvabilité financière de l'Espagne, s'inquiétant de la récession qui complique ses objectifs budgétaires.

«Nous considérons qu'il existe une probabilité d'environ 30% que la note soit encore abaissée, cette année ou bien l'an prochain», a indiqué vendredi Maria Fernandez de Heredia.

Le pays, quatrième économie de la zone euro, a renoué au premier trimestre avec la récession, deux ans à peine après en être sorti, avec un PIB qui aurait reculé de 0,4%, selon la Banque d'Espagne.

Optimisme à Madrid

Le gouvernement espagnol a dévoilé vendredi ses prévisions économiques pour les prochaines années, tablant sur une légère croissance, de 0,2%, du PIB en 2013, et visant l'équilibre budgétaire pour 2016.

«Pour 2013, nous tablons sur une légère croissance du PIB», de 0,2%, a déclaré le ministre de l'Economie Luis de Guindos, à l'issue du Conseil des ministres, alors que le pays a renoué avec la récession ce trimestre et devrait, selon le gouvernement, voir son PIB reculer de 1,7% en 2012.