De Paris à New York, les marchés ont salué jeudi l'annonce d'une action concertée des banques centrales et le soutien affiché par la France et l'Allemagne à la Grèce, en attendant une réunion des ministres européens des Finances en Pologne qui s'ouvrait dans la soirée.

Peu avant la clôture des places financières européennes, les banquiers centraux des pays les plus riches ont agréablement surpris les investisseurs en annonçant une action coordonnée pour éviter le tarissement des liquidités.

«C'est une très bonne surprise. Un signe très fort, enfin, de coordination entre les Banques centrales», a relevé Dov Adjedj, vendeur d'actions chez Aurel BGC.

La Banque centrale européenne (BCE), la Réserve fédérale américaine (Fed), la Banque d'Angleterre, la Banque du Japon et la Banque nationale suisse ont décidé d'approvisionner les établissements financiers en dollars.

Les craintes sur la capacité des banques européennes à se refinancer en dollars s'étaient multipliées ces dernières semaines, en raison de la crise de la dette en zone euro qui a mis à mal la confiance des investisseurs.

La plupart des fonds monétaires américains, grands pourvoyeurs de liquidités, avaient ainsi décidé de réduire leurs approvisionnements.

Dès l'annonce, les Bourses et les valeurs bancaires européennes montaient en flèche.

Euphoriques, la Bourse de Paris a gagné 3,27% en clôture, Londres 2,11% et Francfort 3,15% tandis que Milan progressait de 3,56% et Madrid de 3,63%.

À New York, le Dow Jones prenait 1,14% vers 12h35.

Les principales banques européennes ont vu leur cours s'envoler en Bourse: à Paris, BNP Paribas a bondi de 13,38%, suivie de Crédit Agricole (+5,89%) et Société Générale (+5,44%). À Francfort, Commerzbank a gagné 7,81% et Deutsche Bank 5,82%.

«Pour l'instant, il faut que le marché digère l'information. La confiance ne revient pas en un claquement de doigts», a toutefois tempéré Arnaud de Champvallier, gérant chez Turgot Asset Management, d'autant que «Lagarde souffle un peu le froid après le chaud des Banques centrales».

La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde a affirmé jeudi que les économies occidentales étaient plongées dans un «cercle vicieux» aggravé par «les atermoiements des dirigeants» politiques.

Elle a appelé le monde à «faire front commun» pour parer au risque de récession aux États-Unis et en Europe, estimant que «personne» ne serait épargné si ces économies rechutaient.

La zone euro devrait éviter de sombrer dans la récession, mais les prévisions de croissance au second semestre doivent être revues à la baisse, avait prévenu auparavant la Commission européenne.

«Nous nous attendons à ce que la croissance économique cale, mais pas à une récession», a déclaré Olli Rehn, le commissaire chargé des affaires économiques et financières.

Certes, la Commission a maintenu son estimation d'une hausse de PIB de 1,6% en zone euro pour l'ensemble de l'année, mais la crise de la dette plombe toujours la confiance et la sortie définitive de la crise est loin d'être en vue.

Des statistiques décevantes publiées outre-Atlantique (ralentissement de la production industrielle, inscriptions au chômage en hausse) ont attisé les craintes d'un ralentissement de l'économie mondiale, sans toutefois décourager les investisseurs.

Reléguant au second plan leurs craintes sur la santé de l'économie mondiale, les marchés semblaient rassurés par l'initiative franco-allemande en faveur de la Grèce.

Les déclarations du président français Nicolas Sarkozy et de la chancelière allemande Angela Merkel, intervenues mercredi après la fermeture des Bourses européennes, ont contribué à une nette hausse des marchés.

«Les Européens ont de nouveau assuré le service minimum. Nous accueillons positivement les conclusions des événements de la nuit, mais nous n'en attendons pas de détente significative», ont jugé les analystes du Crédit Mutuel CIC.

Les deux dirigeants se sont dits «convaincus» que l'avenir de la Grèce était dans la zone euro.

Le premier ministre grec Georges Papandréou a de son côté réaffirmé la «détermination absolue» de la Grèce à respecter ses engagements.

Si les déclarations franco-allemandes confirmant l'appartenance pleine et entière de la Grèce à la zone euro ont procuré un répit, les marchés restaient nerveux avant une réunion des ministres européens des Finances en Pologne à partir de jeudi soir.

La situation autour du dossier grec reste tendue et les marchés continuent à se focaliser sur la zone euro.

Après des mois de blocage entre le Parlement et les gouvernements européens, un accord de principe pour durcir le Pacte de stabilité et la discipline budgétaire commune dans l'UE face à la crise de la dette a été conclu à Strasbourg jeudi matin.

Ce dispositif prévoit des sanctions financières sous forme de dépôt d'argent sur des comptes bloqués pour les pays trop laxistes qui laisseraient filer leurs déficits, et des procédures plus automatiques que par le passé pour punir les mauvais élèves en Europe.

Cet accord doit toutefois être soumis aux ministres européens des Finances qui devaient se réunir à Wroclaw en Pologne. Cette réunion de deux jours doit en principe permettre de surmonter les obstacles restants à la mise en oeuvre du second plan d'aide à la Grèce décidé par l'Union européenne le 21 juillet.

L'approbation de ce plan, très attendue par les marchés, traîne toutefois en longueur et bute sur les réticences de plusieurs pays, dont la Slovaquie et la Finlande.

Le premier ministre finlandais Jyrki Katainen a certes indiqué jeudi ne pas souhaiter une sortie de la Grèce de la zone euro, mais a maintenu sa demande de garanties.

Fait exceptionnel, le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner assistera à cette réunion, alors que les États unis considèrent que l'économie mondiale restera affaiblie tant que la crise de la zone euro persistera.

M. Geithner a estimé mercredi que les Européens allaient «devoir agir plus vite» et qu'ils devraient injecter davantage de fonds pour éviter une crise majeure.

Les Européens cherchent désespérément à se sortir de ce bourbier dans lequel ils sont enlisés depuis décembre 2009, réaffirmant presque quotidiennement leur soutien indéfectible à la monnaie unique, mais restant divisés sur les moyens d'en finir avec la crise de la dette.

Mme Merkel a de nouveau écarté jeudi la mise en place d'euro-obligations, mécanisme de mutualisation des dettes entre pays de la zone euro, au grand dam des marchés.