Christine Lagarde a affronté mercredi son baptême du feu comme directrice générale du Fonds monétaire international avec une réunion de son conseil d'administration sur les banques européennes, après des jours de controverse.

Cette instance où siègent les représentants de 24 Etats membres, dont cinq de la zone euro, a discuté selon son ordre du jour officiel des conclusions préliminaires de ses économistes sur l'état de l'économie et de la finance mondiales.

Selon une source proche de l'institution, le «Rapport sur la stabilité financière dans le monde» publié par le FMI chaque semestre, et attendu le 21 septembre, examine en détail la solidité du système bancaire européen.

Cette source s'est refusée à donner des précisions à l'AFP sur la teneur des discussions.

Elle a fuité dans la presse, contrairement à la tradition de confidentialité de l'institution de Washington. D'après le Financial Times, qui a cité «deux responsables», la réunion a vu éclater une «vive controverse» entre fonctionnaires du FMI et Européens.

Les calculs des économistes du FMI montrent que si les banques européennes inscrivaient à leur bilan les obligations des Etats de la zone euro à leur valeur de marché, leurs fonds propres tangibles chuteraient d'environ 200 milliards d'euros au total, soit de 10 à 12%, a rapporté le quotidien britannique.

Ces chiffres sont visiblement ceux qui ont poussé samedi Mme Lagarde, lors d'une conférence à Jackson Hole (Wyoming, Ouest des Etats-Unis), à encourager les Européens à recapitaliser, si besoin par des fonds publics, les banques du continent. Selon elle, ce serait «essentiel pour mettre fin à la contagion» de la crise financière.

Ces propos lui ont valu une pluie de critiques en Europe, dont les dirigeants ont fait valoir la bonne santé des grands établissements.

Son successeur au ministère des Finances à Paris, François Baroin, a déclaré mercredi qu'il n'y avait «aucune interrogation et aucune inquiétude à avoir» sur le système bancaire français. La veille, le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, avait dit son étonnement après les propos de Mme Lagarde.

Celle-ci, qui a pris ses fonctions au FMI le 5 juillet, a promis au conseil d'administration de ne pas «représenter les intérêts d'une région particulière».

Mais si elle est la directrice des services du FMI, les statuts lui imposent aussi de veiller à la prise en compte des intérêts des Etats membres. En l'occurrence, le rejet ferme par les Européens des calculs de ces services devrait l'obliger à un exercice délicat de compromis.

«Nous allons réfléchir à la discussion d'aujourd'hui avec le conseil d'administration» d'ici à la publication du rapport prévue le 21 septembre, a indiqué dans un communiqué un porte-parole du FMI, William Murray.

«Jusque-là, il ne serait pas convenable de faire d'autres commentaires», a-t-il ajouté.

Le précédent «Rapport sur la stabilité financière dans le monde», publié en avril, désignait clairement les banques européennes comme le maillon faible du système financier mondial. Il recommandait déjà de recapitaliser les plus faibles. Mais il ne contenait pas les chiffres qui font aujourd'hui débat.

Un autre rapport publié en avril 2009 avait créé une polémique semblable: les Européens avaient jugé exagérément pessimistes les projections des pertes de leurs banques du fait de la crise financière aux Etats-Unis. Mme Lagarde, alors ministre, avait fait part des «plus grandes réserves» des gouvernements du continent sur les calculs du FMI.

Depuis, cette crise n'a fait que muter et se reporter sur la dette publique, sans trouver de solution convaincante.