L'Italien Mario Draghi a été adoubé vendredi comme futur président de la Banque centrale européenne (BCE) par les dirigeants de l'UE, Paris ayant obtenu l'assurance de continuer à siéger dans l'exécutif de l'institution de Francfort après le départ de Jean-Claude Trichet.

«Super Mario» va prendre en novembre les rênes de la politique monétaire européenne à un moment critique pour l'euro, menacé par la crise de la dette partie de Grèce.

Les chefs d'État et de gouvernement réunis à Bruxelles ont nommé Mario Draghi «comme nouveau président de la Banque centrale européenne» à compter du 1er novembre, a annoncé le président de l'Union européenne Herman Van Rompuy à l'issue d'un sommet à Bruxelles.

Le gouverneur de la Banque d'Italie, 63 ans, succédera pour huit ans au Français Jean-Claude Trichet, en poste depuis 2003.

Considérée comme une formalité après la désignation unanime des ministres des Finances de la zone euro, la nomination formelle était initialement attendue jeudi. Mais elle a été reportée à vendredi, car la France, qui ne veut pas se retrouver exclue du directoire de la BCE, exigeait des garanties.

Ces atermoiements européens autour de la succession de Jean-Claude Trichet ont fait désordre au moment où la zone euro se débat au milieu de la pire crise de son histoire.

En l'état actuel de la composition de l'organe exécutif de l'institution, le départ de Jean-Claude Trichet implique qu'il n'y aura plus, au 1er novembre, de Français en son sein, tandis que deux Italiens y siégeront: Mario Draghi et Lorenzo Bini Smaghi, dont le mandat ne prend fin qu'en 2013.

Herman Van Rompuy a annoncé avoir eu «un contact téléphonique» vendredi matin avec l'intéressé qui lui a «fait part de son intention de ne pas terminer son mandat». «C'est à M. Smaghi de décider du calendrier, nous respectons de l'indépendance de la BCE», a-t-il ajouté.

Le président Nicolas Sarkozy a également dit avoir reçu un appel de Lorenzo Bini Smaghi qui lui a confirmé «qu'avant la fin de l'année, il serait appelé à avoir de nouvelles fonctions», tout en se défendant d'être intervenu «dans le jeu politique italien bien compliqué».

«Chacun considère qu'il ne peut pas y avoir deux membres de la même nationalité dans le directoire de la BCE», a-t-il insisté.

Le nom de la secrétaire générale du régulateur français des banques et des assureurs, Danièle Nouy, circule pour entrer au directoire.

Lorenzo Bini Smaghi était sous pression de son gouvernement pour céder sa place à un Français afin de lever un obstacle à la nomination de Mario Draghi, mais il rechignait jusque-là, au nom de l'indépendance de la BCE.

«Il y a eu beaucoup d'agitation en coulisse pour trouver une solution», a expliqué un diplomate européen.

Le directoire de la BCE comprend le président, le vice-président et quatre autres membres, tous nommés pour huit ans et théoriquement irrévocables pour garantir leur indépendance.

Les Européens ont tenté d'assurer que le compromis arraché vendredi ne remettait pas en cause le statut de la BCE.

«Nous sommes tous persuadés que M. Draghi exercera une présidence forte et indépendante de la BCE (...) c'est essentiel en temps normaux et indispensable en temps difficiles», a affirmé Herman Van Rompuy.

Lorenzo Bini Smaghi lorgne le poste de gouverneur de la Banque d'Italie, mais cela se heurte aux fragiles équilibres internes à la majorité de Silvio Berlusconi en Italie.

Ce dernier s'est borné vendredi à dire qu'il avait «toutes les compétences» requises, mais que son choix, entre trois candidats, n'interviendrait que la semaine prochaine.