Les trois principales banques françaises cotées, rattrapées par leur exposition à la Grèce, sont désormais sous la menace d'un abaissement de leurs notes par l'agence Moody's, qui envisage de plus en plus une faillite du pays alors que patinent les négociations européennes sur l'aide à la Grèce.

Moody's a annoncé mercredi qu'elle envisageait d'abaisser la note de BNP Paribas, Société Générale et Crédit Agricole et pour se déterminer, va passer en revue leur exposition à la dette de l'État grec et à celle du secteur privé.

N'écartant plus un défaut de paiement d'Athènes, l'agence mesurera notamment «l'incohérence potentielle qui pourrait exister entre un défaut ou une restructuration (de la dette grecque) et les notes actuelles» des établissements français.

Ce passage au crible ne devrait pas entraîner d'abaissement de notation de plus d'un cran dans le cas de BNP Paribas et Crédit Agricole, selon Moody's. Mais il pourrait atteindre deux crans pour Société Générale, une différence liée à un élément technique.

L'exposition à la Grèce n'est pas de même nature pour les trois banques. Dans le cas du Crédit Agricole, elle tient avant tout à sa filiale Emporiki et concerne donc pour l'essentiel des créances privées.

L'agence considère que l'effet «secondaire» d'un défaut de l'État grec pourrait être «significatif» pour la banque, du fait de cette exposition à l'économie locale.

Pour BNP Paribas et Société Générale, en revanche, c'est avant tout le portefeuille de titres d'État qui est concerné. Il atteignait, fin mars, 2,5 milliards d'euros pour Société Générale et 5,0 milliards pour BNP Paribas. Il n'était que de 600 millions pour Crédit Agricole.

Par ailleurs, Société Générale possède également une filiale en Grèce, Geniki, mais avec un portefeuille de prêts au secteur privé nettement plus restreint que celui d'Emporiki, à 3,2 milliards contre 21,1.

L'agence précise qu'elle prendra également en compte, lors de son évaluation, le profil financier «solide» des établissements français, l'effet de taille et la diversité de leurs sources de revenus.

L'annonce a entraîné à la baisse les titres des trois banques. BNP Paribas a perdu 2,49%, Société Générale 2,55% et Crédit Agricole 2,48%.

«Ce n'est pas une nouveauté», a commenté un analyste, sous couvert d'anonymat, au sujet de l'exposition des banques françaises à la Grèce.

«Le risque est cerné et il est gérable», a-t-il ajouté, estimant que les fonds propres des banques permettraient d'absorber une décote éventuelle sur la dette de l'Etat grec.

Mi-mai, une autre des trois agences de notation majeures, Fitch, avait indiqué ne pas envisager d'abaissement de notation «sur la seule base de leur exposition au risque grec».

Le porte-parole du gouvernement François Baroin a indiqué mercredi n'être «pas inquiet» de l'intention exprimée par l'agence Moody's, ajoutant que cet abaissement ne serait que «limité».

Un banquier a mis en perspective la décision en soulignant que Moody's s'était lancé ces derniers mois dans un processus de révision de ses évaluations des grandes banques dans le monde, ses notes étant fréquemment supérieures à celles de ses deux concurrents, Standard and Poor's et Fitch.

Interrogé par l'AFP, Crédit Agricole a rappelé que les créances privées d'Emporiki représentaient 2% du volume des crédits du groupe à l'économie.

BNP Paribas a souligné que l'ensemble de ses créances, privées et publiques, sur la Grèce ne représentait que 0,6% de ses engagements à l'échelle du groupe.

Selon l'analyste, la décision de Moody's «pourrait avoir un impact sur le coût de refinancement, mais cela serait limité».