Les banques semblaient sur le point de gagner la partie sur la question hautement sensible des bonus, le premier ministre conservateur David Cameron s'étant résolu, selon la presse britannique, à laisser les banquiers empocher les bonus de leur choix.

La décision, qui risque de mécontenter les libéraux-démocrates membres de la coalition au pouvoir, a été prise lors d'une rencontre lundi soir en présence de M. Cameron et de son ministre des Finances George Osborne, ont rapporté plusieurs journaux.

«Cameron a admis sa défaite sur les bonus des banquiers», a assuré le Daily Telegraph.

Le sentiment d'une victoire des banquiers a été conforté par une audience mardi devant une commission parlementaire du patron de Barclays, Bob Diamond, qui s'est refusé à prendre tout engagement concret sur les bonus malgré les exhortations des députés qui l'interrogeaient.

Parmi les mesures qui semblent désormais écartées figurent l'obligation de publier une liste nominative de tous les cadres touchant une prime annuelle supérieure à 1 million d'euros, ou l'instauration d'un impôt spécial sur les bonus à l'instar de celui mis en place de manière temporaire par les travaillistes en 2009.

Cette taxe était notamment évoquée par les libéraux-démocrates. Mais les milieux économiques doutaient depuis un moment que M. Cameron s'en prenne de front à la City, alliée traditionnelle des conservateurs.

Selon le Times, M. Cameron a «donné son feu vert à contrecoeur» aux bonus des banquiers, et tentera d'obtenir en contrepartie des engagements sur une hausse des prêts aux entreprises. Il essaiera aussi d'imposer une certaine modération aux banques sauvées par des fonds publics lors de la crise financière de 2008.

La question des bonus a ressurgi avec vigueur au Royaume-Uni à l'approche de leurs versements annuels. Ils devraient atteindre cette année quelque 7 milliards de livres (8,4 milliards d'euros).

L'annonce par la presse que le directeur général de Royal Bank of Scotland (RBS), Stephen Hester, allait recevoir, à lui seul, une prime de 2,5 millions de livres (3 millions d'euros) a eu un retentissement particulier: détenue à plus de 80% par l'Etat, RBS n'a dû son salut qu'aux dizaines de milliards de livres d'argent public engloutis dans son sauvetage.

Durant une audition souvent tendue devant la commission des finances de la chambre des Communes, le directeur général de Barclays a assuré qu'il était «sensible à l'opinion du public» et ferait «tout son possible pour encourager à la retenue» sur les bonus.

Exhorté à montrer l'exemple en tant que dirigeant d'une des premières banques du pays, M. Diamond s'est néanmoins refusé à prendre tout engagement sur sa prochaine prime, estimée à 8 millions de livres (9,6 millions d'euros) par la presse.

Face à lui, des élus de tous bords ont insisté sur la «colère» et l'«incompréhension» de leurs administrés sur la persistance de bonus faramineux au moment où le pays fait face à une cure d'austérité sans précédent.

Mais M. Diamond a réaffirmé que le maintien de ces bonus étaient indispensables pour «attirer et retenir les meilleurs talents» dans un secteur mondialisé «où on peut facilement aller travailler aux Etats-Unis, en Chine ou au Japon» si les conditions y sont plus attractives.

«Aucune banque ne devrait devenir un poids pour le contribuable», a-t-il aussi assuré.