Les Européens et le FMI ont décidé dimanche de prêter 85 milliards d'euros à l'Irlande pour la renflouer et se sont entendus sur les contours d'un futur Fonds de secours de la zone euro, dans l'espoir de freiner la contagion d'une crise qui menace Portugal et l'Espagne.

Réunis à Bruxelles pour une session extraordinaire, les ministres des Finances de l'Union européenne «se sont mis d'accord à l'unanimité pour accorder une aide financière» de l'UE et du Fonds monétaire international, ont-ils annoncé dans une déclaration.

Ce plan, qui fera de l'Irlande le deuxième pays de la zone euro à recevoir un tel soutien en six mois après la Grèce, est destiné notamment à renflouer les banques irlandaises.

Sur les 85 milliards d'euros de prêts sur trois ans, 35 milliards seront destinés au secteur bancaire, criblé de dettes à la suite de l'éclatement d'une bulle immobilière qui a plongé le pays dans la récession et fait grimper le déficit public national à des sommets.

Dix milliards d'euros vont servir pour «des mesures de recapitalisation immédiates» et 25 milliards pour des mesures de soutien aux banques si elles sont nécessaires. Les 50 milliards d'euros restants seront destinés à couvrir les besoins budgétaires de l'Irlande.

Comme pour la Grèce au printemps, il s'agit d'un effort commun UE-FMI.

Un tiers du total, soit 22,5 milliards, sera fourni par le FMI, un tiers proviendra d'un instrument de prêts de l'ensemble de l'UE, garanti par le budget communautaire, et le tiers restant viendra du Fonds européen de stabilité de la zone euro et de prêts bilatéraux du Royaume-Uni, de la Suède et du Danemark.

Enfin, la moitié des mesures d'aide au secteur bancaire (17,5 milliards d'euros) sera financée par l'Etat irlandais. Cette somme «proviendra de notre Fonds national de réserve pour les retraites ainsi que d'autres liquidités nationales», a précisé le Premier ministre irlandais Brian Cowen à Dublin.

Concernant le taux d'intérêt des prêts, M. Cowen a annoncé que l'Irlande devrait payer un taux moyen et flexible de 5,8% par an, plus que les 5,2% consentis à la Grèce, dans le cadre du plan de sauvetage, mais moins que ce que devrait payer le pays aujourd'hui sur les marchés.

L'annonce de ces détails du programme était attendue dans l'angoisse par les Irlandais, qui ont dû en échange consentir d'énormes sacrifices en termes de coupes claires dans les dépenses publiques et de hausses d'impôts. Une grande manifestation de protestation s'est déroulée samedi à Dublin.

L'UE a par ailleurs donné à Dublin un an de plus, jusqu'en 2015, pour ramener dans la limite européenne autorisée de 3% du PIB son déficit public astronomique, qui devrait atteindre 32% cette année du fait des injections de liquidités consenties pour sauver les banques.

«Une majorité s'est dégagée» pour dire que «2015 serait plus crédible», car 2014 «n'aurait pas créé suffisamment de confiance sur les marchés», a souligné le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.

En aidant l'Irlande, l'Europe et le FMI espèrent stopper un incendie financier qui menace déjà de gagner d'autres pays aux finances publiques fragiles comme le Portugal et l'Espagne, et de déstabiliser toute l'Union monétaire.

Pour rassurer les marchés, les ministres de la zone euro ont aussi accéléré les préparatifs du futur Fonds de soutien permanent aux pays en crise, appelé à voir le jour mi-2013, en remplacement du mécanisme actuel, temporaire.

Ils se sont mis d'accord sur un élément clé: les modalités des contributions des banques privées qui prêtent aux Etats dans ce dispositif.

Contrairement à ce que voulaient au départ les Allemands, les investisseurs privés, c'est-à-dire des banques et fonds d'investissement qui détiennent des titres de dette des Etats, ne devront pas mettre la main au portefeuille de manière automatique.

Cela se fera au cas par cas, en cas de crise de solvabilité d'un Etat. Le pays concerné négociera alors la restructuration de sa dette avec les créanciers privés.

L'accord a été rendu possible après un compromis franco-allemand, trouvé lors d'une concertation téléphonique dimanche entre plusieurs responsables européens, la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy.