Des experts de l'UE et du FMI ont commencé lundi à Dublin à mettre au point les détails d'un vaste plan de sauvetage à l'Irlande, qui pourrait atteindre jusqu'à 90 milliards d'euros, perçu comme une «reddition» par une population largement réticente.

«Une capitulation sans précédent», une «ignominie», «une reddition éhontée»: la presse celtique était unanime lundi à condamner l'appel à des bailleurs de fonds étrangers pour résorber la dette astronomique qui plombe l'Irlande.

Dès l'annonce du plan, dimanche soir à Dublin, quelques manifestants s'en sont violemment pris aux voitures des ministres quittant leurs bureaux officiels. L'un d'eux a été blessé au moment de son interpellation par la police.

«Nous ne sommes pas en faillite», a cependant assuré lundi matin le ministre des Finances Brian Lenihan, démentant que le FMI allait dorénavant gérer les affaires de l'île et notamment exiger un durcissement d'un délicat plan de rigueur que Dublin doit annoncer mercredi.

M. Lenihan a assuré que les instances internationales étaient «globalement satisfaites» des nouvelles mesures d'austérité, préalables au plan international de sauvetage. Elles prévoient 15 milliards d'euros d'économies d'ici à 2014 afin de ramener à 3% du produit intérieur brut (PIB) le déficit public, actuellement de 32%.

Le gouvernement irlandais aura fort à faire pour vendre ce plan auprès d'une population à bout de patience. Selon la presse, la potion amère à venir comprend de nouvelles réductions des allocations chômage et familiales ainsi que de nouvelles suppressions d'emplois publics. Brisant un tabou, le gouvernement devrait de plus toucher au salaire minimum.

L'aide à l'Irlande «est justifiée afin de sauvegarder la stabilité financière de l'UE et de la zone euro», ont déclaré dans un communiqué les ministres des Finances de la zone euro et de toute l'UE, dimanche soir en acceptant la demande d'aide formulée par Dublin.

Après plus d'une semaine de démentis et de tergiversations, l'Irlande va ainsi devenir le deuxième pays de la zone euro à bénéficier cette année d'un soutien, après la Grèce au printemps dernier.

Le FMI s'est dit prêt à apporter sa contribution par le biais d'un prêt sur plusieurs années.

Lundi à Londres, le ministre britannique des Finances George Osborne a indiqué que le Royaume-Uni allait fournir à l'Irlande un prêt bilatéral d'environ 7 milliards de livres, soit 8 milliards d'euros, dans le cadre de l'effort international.

Il est également prévu que la Suède - également non membre de la zone euro comme le Royaume-Uni - accorde en complément des prêts bilatéraux à l'Irlande.

Le montant total du plan de sauvetage international n'est pas encore connu. Le gouvernement irlandais a indiqué que «quelques semaines» seraient encore nécessaires afin de finaliser les détails de l'aide. Des experts de l'UE et du FMI se trouvent déjà depuis jeudi à Dublin afin d'en étudier les modalités techniques.

Des sources diplomatiques ont cependant indiqué à l'AFP que la somme serait comprise entre 80 et 90 milliards d'euros. La Grèce a obtenu un prêt de 110 milliards d'euros sur trois ans, étant alors dans l'impossibilité d'emprunter à des taux d'intérêt abordables pour refinancer sa dette.

L'objectif est similaire pour l'Irlande à cette différence près qu'il s'agit cette fois principalement d'aider les banques irlandaises en crise, que Dublin a déjà dû renflouer à hauteur de 50 milliards d'euros environ, faisant exploser son déficit public.

Il s'agit aussi d'éviter une contagion à d'autres pays aux finances publiques fragiles de l'Union monétaire, comme le Portugal ou l'Espagne, via la hausse des taux d'emprunts obligataires.

La décision d'un plan d'aide à l'Irlande faisait progresser l'euro, lundi matin. Ce matin, la devise européenne valait 1,3737 dollar contre 1,3673 dollar vendredi soir.