L'économie allemande a confirmé mardi son éclatante santé, avec une croissance record tirée notamment par la demande intérieure, de quoi faire taire ceux qui l'accusent de miser sur les exportations contre le reste des Européens.

Le Produit intérieur brut (PIB) a progressé de 2,2% au deuxième trimestre par rapport au trimestre précédent, un record sur un trimestre depuis la Réunification il y a 20 ans, selon des chiffres définitifs. En glissement annuel, la croissance est de 4,1%.

«La demande intérieure a contribué à hauteur de plus de 60% à la croissance» au deuxième trimestre, a souligné le ministre de l'Économie Rainer Brüderle dans un communiqué.

Même si les exportations ont joué un grand rôle, avec un bond de 8,2%, «ce n'est en aucun cas l'export seul qui porte la croissance», a-t-il ajouté.

Le message est clair: faire taire les critiques des partenaires commerciaux de l'Allemagne, dans l'Union européenne comme dans le reste du monde.

La France et les États-Unis notamment avaient accusé Berlin de faire cavalier seul en négligeant de soutenir sa demande intérieure, alors qu'elle pourrait stimuler en retour les exportations des autres pays.

«Si la demande intérieure allemande s'accélère et déborde sur les autres pays membres, cela peut contribuer à réduire les déséquilibres en zone euro», a déclaré le Commissaire européen aux affaires économiques Olli Rehn, dans un entretien au Handelsblatt paru mardi.

La Commission européenne se plaint depuis des années d'une économie à deux vitesses dans la zone, entre des pays mondialement compétitifs comme l'Allemagne, et des pays comme l'Espagne ou l'Italie, dont les déficits commerciaux se sont encore creusés avec la crise.

L'Allemagne a profité plus rapidement que ses voisins de la reprise du commerce mondial, grâce à son économie très orientée vers l'export et la compression des salaires, un trait renforcé par son aversion historique à l'inflation.

Son économie a fait un premier pas vers un rééquilibrage. «La reprise semble être beaucoup plus autonome que ce que certains observateurs avaient pensé», estimait l'économiste d'ING Carsten Brzeski. «Les fondamentaux sont en place pour faire tourner le moteur de la croissance en douceur».

Après trois trimestres de baisse, la consommation des Allemands a repris des couleurs avec une progression de 0,6%. Et son repli au premier trimestre s'est avéré moins important qu'initialement annoncé, à -0,1% contre -0,8% précédemment.

Les investissements, autre élément de la demande intérieure, ont bondi de 4,7%. Parmi eux, les investissements dans les biens d'équipement se sont accrus de 4,4% et ceux dans le bâtiment de 5,2%.

Il y a des progrès, mais «ce n'est certainement pas assez», tempère Dirk Schumacher de Goldman Sachs. Ainsi la consommation des ménages est toujours en recul de 0,7% par rapport au deuxième trimestre 2009, exactement comme au premier trimestre, note-t-il.

L'éloignement de la menace du chômage, qui stagnait à 7,6% en juillet, parle en faveur d'un prolongement des envies d'achats des Allemands, mais les hausses de salaires se font encore attendre.

Alors que la Bundesbank prévoit environ 3% de hausse du PIB en 2010, ce qui ferait de l'Allemagne le champion de la croissance parmi les pays industrialisés du G7, les syndicats commencent à donner de la voix, notamment le puissant IG Metall qui demande des hausses de salaires anticipées.

L'institut de recherche économique DIW a recommandé mardi des hausses de salaires seulement ponctuelles, en raison des incertitudes sur la conjoncture mondiale.