Le montant de la colossale dette de l'État japonais a franchi un nouveau sommet, dépassant à présent les 900 000 milliards de yens (plus de 7950 milliards d'euros), a révélé mardi le ministère des Finances.

Hors endettement des régions, le passif public s'est élevé à 904 080 milliards de yens fin juin, ayant augmenté de 21 150 milliards de yens (185 milliards d'euros) par rapport au total constaté à l'issue du mois de mars, selon un rapport économique trimestriel.

D'après le document, 81,2% de cet énorme fardeau correspondent à des bons du Trésor, soit le total le plus élevé à ce jour, a reconnu un responsable.

Le Japon est le pays riche le plus endetté, avec une charge qui approche 200% de son produit intérieur brut (PIB) annuel, sans compter les engagements des régions.

Ce cumul résulte des multiples dispendieux plans de relance économique mis en oeuvre depuis les années 1990 pour doper l'activité malmenée par des crises à répétition, intrinsèques ou originaires de l'extérieur.

Ce montant coûte très cher à rembourser, mais cela n'empêche pas les gouvernements successifs d'utiliser des émissions massives d'obligations d'État pour combler chaque année un budget largement déficitaire. Près de la moitié des dépenses générales de l'État sont couvertes par des emprunts.

L'actuel gouvernement de centre-gauche, conduit par Naoto Kan, s'est néanmoins engagé à plafonner le recours à l'endettement, en étant plus rigoureux sur le volet des décaissements, et en promettant de réformer drastiquement le système fiscal qui ne remplit plus son rôle.

Le Japon a pu jusqu'à présent se permettre de tels excès car plus des neuf dixièmes des bons du Trésor sont achetés par des institutions et citoyens japonais, ce qui limite les risques de faillite de l'État. Ce dernier, tancé par les organismes internationaux, dit toutefois mesurer désormais le poids handicapant de cette dette pour les générations futures.

La Banque du Japon laisse son taux directeur inchangé

Par ailleurs, le comité de politique monétaire de la Banque centrale du Japon (BoJ) a décidé mardi à l'unanimité de maintenir son taux directeur au jour le jour inchangé au niveau très bas de 0,10%, selon un communiqué dans lequel l'institut confirme une lente amélioration économique.

Cette décision ne constitue pas une surprise, les incertitudes pesant encore sur la conjoncture internationale et le fait que le dynamisme intérieur soit toujours bridé par une handicapante baisse des prix (déflation) forcent naturellement l'institut d'émission à conserver une politique monétaire très accommodante.

Le taux directeur de la BoJ n'a pas varié depuis décembre 2008, et diverses autres dispositions ont été prises, encore récemment, pour inciter les entreprises à investir et les banques à être bien disposées à leur égard.

«L'économie du Japon poursuit une reprise modérée», a redit mardi la BoJ, laquelle voit une évolution dans le bon sens mais ne masque pas les risques.

«Grâce notamment à la demande en provenance des pays émergents, les exportations comme la production industrielle continuent de se reprendre, et les investissements en biens d'équipement ont tendance à repartir», a justifié la banque.

«L'environnement de l'emploi et des salaires reste certes difficile, mais une tendance à l'amélioration se dessine», a-t-elle ajouté.

La Banque du Japon avait relevé le mois dernier à +2,6% ses prévisions d'évolution du produit intérieur brut (PIB) du Japon pour l'année budgétaire en cours, d'avril 2010 à mars 2011.

Mais alors que ce redémarrage est en partie tiré par les exportations, la Banque du Japon prête une attention toute particulière à la situation environnante.

Les craintes récentes d'un grippage de la reprise américaine, une légère décélération de la dynamique économie chinoise et les soubresauts financiers en Europe ont entraîné une hausse du yen face au dollar et à l'euro, une tendance qui entrave la force des entreprises exportatrices japonaises à l'étranger et rejaillit sur leur santé.

«Il existe des risques de ralentissement dus à la situation internationale et il convient de rester attentif aux conséquences sur les économies intérieure et extérieure des mouvements sur les marchés découlant notamment de l'évolution des finances publiques d'une partie des pays d'Europe», a réitéré la BoJ.

Par ailleurs, le phénomène pernicieux de la déflation à l'intérieur, qui s'atténue certes mais reste perceptible, pousse les entreprises dans un engrenage de réduction des coûts et de moindres investissements.

Tour à tour, elles baissent leurs prix de vente dans le but compétitif d'attirer des clients, mais sans nécessairement y parvenir, la progression des salaires étant elle aussi freinée et la propension à consommer atténuée.

«Les prix au détail (hors ceux des produits frais périssables) continuent de fléchir en comparaison annuelle, parce que de façon générale la demande demeure atone, mais à bien y regarder, l'ampleur du déclin tend à se réduire», remarque cependant la banque.

La sortie de la déflation est une priorité pour les autorités japonaises.

Le ministre des Finances japonais, Yoshihiko Noda, a redit mardi qu'il souhaitait une «coopération plus forte que jamais entre le gouvernement et la Banque du Japon, au vu des problèmes actuels que sont la cherté du yen et la déflation».

«Nous savons que l'un des plus gros défis de la Banque du Japon est de sortir l'économie japonaise de la déflation et de la remettre sur la trajectoire d'une croissance durable sur fond de stabilité des prix», ont pour leur part réécrit mardi les membres de la BoJ dans leur communiqué.

Et d'ajouter: «dans ce but, nous avons l'intention de coopérer en maintenant un environnement financier accommodant».