Après une décennie marquée par une longue restructuration et un plongeon en Bourse, les dirigeants du Club Med commencent à retrouver le sourire qui fait la marque de commerce de leurs célèbres gentils organisateurs (G.O.).

C'est qu'il s'en est passé, des choses, au siège social du Club Med à Paris au cours de la dernière décennie. Fini les pubs avec la chanson Haut les mains visant à séduire les jeunes adultes à la recherche de bon temps à la plage. Le Club Med vise désormais les familles aisées, qui représentent 70% de sa clientèle, contre 20% de couples et 10% de célibataires. En 2002, les familles ne représentaient que le tiers des clients du Club Med.

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«Nous avons monté en gamme en matière de confort et nous avons abandonné notre concept de double clientèle (jeunes adultes et familles). Nous avons un savoir-faire unique avec les enfants et nous n'avons pas été copiés sur cet aspect», dit Michel Wolfovski, directeur général des finances du Club Med, de passage à Montréal vendredi dernier.

Le virage familial du Club Med est le pari d'Henri Giscard d'Estaing - fils de l'ancien président français -, nommé PDG de l'entreprise française en 2001. «Ce n'était pas une décision facile, mais il n'y avait pas d'autre possibilité, dit Michel Wolfovski. On voyait le mur auquel on était confrontés (la concurrence dans les tout-inclus). La véritable difficulté, ce fut de mettre cette décision en application. Il a fallu fermer 55 de nos 120 villages qui ne satisfaisaient plus à nos critères et il a fallu accepter de perdre des clients. De 2001 à 2007, nous avons perdu des clients chaque année. Nous avons eu une hausse de la clientèle en 2008, suivie de nouveau d'une baisse en 2009 à cause de la crise économique.»

L'action du Club Med a perdu 90% de sa valeur depuis 10 ans et 66% de sa valeur depuis 5 ans, mais ses dirigeants ont bon espoir que les mauvaises nouvelles sont terminées. D'abord, le titre s'est apprécié de 23% depuis un an. Ensuite, l'entreprise a recommencé à générer des profits - 3 millions d'euros de novembre à avril dernier malgré l'éruption du volcan islandais Eyjafjöll qui lui a coûté 5,6 millions d'euros. Finalement, le Club Med ouvrira deux nouveaux villages d'ici la fin de l'année, un pour faire du ski en Chine et l'autre pour profiter du soleil en Égypte. «Ça fait 10 ans qu'on n'a pas ouvert deux villages presque en même temps comme ça», dit Michel Wolfovski.

L'ouverture du village de ski de Yabuli, en novembre, est particulièrement importante: ce sera le premier de ses cinq villages en sol chinois. D'ici 5 ans, le Club Med espère ainsi passer de 50 000 à 200 000 clients chinois par année. La Chine deviendrait ainsi le deuxième pays en matière de clientèle, derrière la France. «Le Club Med et les Chinois, ça colle bien, dit Michel Wolfovski. Les Chinois aiment s'amuser, le concept du tout-inclus les rassure, c'est axé sur la famille et nos G.O. parlent mandarin.»

Afin de bien réussir son entrée dans l'empire du Milieu, le Club Med s'est associé avec le conglomérat chinois Fosun, qui détiendra de 7% à 10% des actions de l'entreprise française. Le PDG du Club Med, Henri Giscard d'Estaing, a d'ailleurs écourté son séjour à Montréal la semaine dernière afin d'officialiser le partenariat à Shanghai.

Malgré son intérêt pour la Chine, le Club Med n'oublie pas ses autres clients dans le monde. Comme ceux de Montréal, qui constituent sa cinquième clientèle en importance derrière Paris, Marseille, Lyon et Bruxelles, mais devant Los Angeles et New York. Le Québec lui fournit aussi le tiers de ses G.O. pour ses villages en Amérique du Nord. «On dit souvent que si le Club Med n'avait pas été inventé par un Belge (Gérald Blitz), il l'aurait été par un Québécois», dit Xavier Mufraggi, PDG du Club Med en Amérique du Nord.