Le parlement suisse doit se prononcer lundi sur un accord signé entre Berne et Washington contesté par la justice, et qui, s'il est accepté par les députés, ouvrira la voie à la transmission aux États-Unis des données de clients d'UBS soupçonnés de fraude fiscale.

Les 200 députés du Conseil national (chambre basse, parlement), qui se réunissent à partir de 12h30 GMT vont devoir valider ou non la demande de renseignements des États-Unis concernant quelque 4450 clients américains soupçonnés de fraude fiscale.

L'accord, signé en août 2009 par les autorités suisses et américaines, avait été rendu caduc en janvier par la justice suisse, le Tribunal fédéral jugeant alors que le document à l'amiable n'autorisait pas la Confédération à violer le secret bancaire pour des cas d'évasion fiscale, mettant les autorités helvétiques dans une situation très délicate.

Berne, qui a selon l'accord avec les États-Unis un an pour transmettre ces données au fisc américain (IRS, Internal revenue service), avait alors décidé de faire valider le document par les députés.

Un premier pas dans ce sens a été franchi jeudi. Les députés du Conseil des États (chambre haute, représentant les cantons) ont alors donné leur feu vert sur cet épineux dossier. Ils ont également refusé de faire valider cet accord par un référendum populaire, ce qui aurait d'autant plus retardé son application.

Selon la Constitution suisse, l'accord nécessite l'approbation des deux chambres pour être validé. En cas de désaccord, le texte peut faire la navette trois fois entre le Conseil des États et le Conseil national. Si aucune entente n'est trouvée, l'accord passera alors devant un comité de conciliation. Ci ce dernier n'arrive pas à aplanir les différends, l'accord sera définitivement enterré.

Et les obstacles à un feu vert du parlement suisse ne manquent pas. Les débats risquent en effet d'être houleux et pourraient se prolonger jusqu'à tard dans la soirée.

Les deux principaux partis du Conseil national, l'UDC (droite populiste, majoritaire) et le Parti socialiste suisse (PSS, 21,5% des sièges) s'affrontent sur des points essentiels.

Les députés de l'UDC voteront ainsi «oui» si l'instauration d'une taxe sur les bonus est refusée et les compétences du gouvernements limitées pour la signature de futurs accords entre Etats.

Les socialistes, qui représentent la deuxième force au parlement, demandent quant à eux l'instauration d'un impôt sur les bonus et rémunérations dépassant 1 million de francs suisses, ainsi qu'une réglementation des fonds propres des banques. Sans cela, ont-ils averti, «le PS se refuse à signer un chèque en blanc en faveur d'UBS».

Dans le cas où l'accord passe ce dernier obstacle, l'Administration fédérale des finances (AFF) transmettra les informations manquantes à l'IRS. Quelque 500 dossiers ont déjà été transmis, avec l'accord des détenteurs de comptes, au fisc américain, a précisé un porte-parole du ministère des Finances.

Un report, voire un refus définitif, risque de mettre autant Berne qu'UBS dans une situation fâcheuse. Refuser d'appliquer l'accord risque en effet de sérieusement ternir les relations entre la Suisse et les États-Unis.

Pour UBS, l'issue serait bien plus fâcheuse, car elle risque de faire face à des poursuites judiciaires aux États-Unis, alors qu'elle se remet à peine des pertes astronomiques subies durant la crise financière.