Le Fonds monétaire international (FMI) impose en Grèce, à travers un plan de sauvetage concocté avec l'Union européenne (UE), les mêmes vieilles recettes d'austérité qui n'ont pas empêché l'Argentine de couler en 2001, selon des analystes.

Le FMI et les pays de l'UE se sont mis d'accord sur la mise en place d'un plan de secours historique allant jusqu'à 750 milliards d'euros pour aider les pays de la zone euro et endiguer la crise financière grecque qui menace de gagner toute la planète.

«C'est un chiffre énorme, mais il ne garantit qu'une chose: que pendant trois ans la Grèce puisse payer sa dette», a estimé Jorge Remes Lenicov, ministre de l'Economie de l'Argentine en 2002, lors de la pire crise économique de son histoire. «Cela règle le problème de sa dette, pas celui de la compétitivité», a-t-il fait valoir.

La recette du FMI pour la Grèce «est la même que pour l'Argentine (avant l'effondrement de 2001): baisser les salaires et augmenter les impôts», a-t-il dit. En Argentine, ce type de mesures avait été suivi en 2001 du défaut de paiement le plus important de l'Histoire, avec 90 milliards de dollars.

La présidente argentine Cristina Kirchner a elle-même comparé la crise économique en Grèce à la débâcle vécue par son pays fin 2001.

«Ces images y ressemblent trop et sont le fruit des mêmes recettes des organismes internationaux de crédit, avec suppression d'administrations municipales, réduction de salaires et ajustement», a-t-elle dit. «C'est la sempiternelle recette de ces organismes qui ne comprennent rien à ce qui se passe dans le monde».

Pour Claudio Loser, ancien haut fonctionnaire du FMI, «le plan d'aide à la Grèce ressemble un peu trop à celui qui était sensé mettre à l'abri l'Argentine».

Le plan de sauvetage destiné à l'Argentine portait sur quelque 40 milliards de dollars en 2000 et 2001 mais le FMI avait lâché le pays devant l'aggravation de la crise.

Les ressemblances entre la crise grecque et l'Argentine de 2001 sont à première vue frappantes: même surendettement, même impossibilité d'éviter la faillite en dévaluant.

La dette grecque atteint 300 milliards d'euros, soit 113% de son Produit intérieur brut. Elle a renoncé à son indépendance monétaire en rejoignant l'euro, comme l'Argentine l'avait fait en accrochant le peso au dollar sous Carlos Menem (1989-1999) et Fernando De La Rua (1999-2001).

L'effondrement économique argentin avait entraîné fin 2001 une grave crise sociale, des supermarchés étaient saccagés, des manifestants tués. Une crise institutionnelle avait suivi, cinq présidents se succédant entre le 20 décembre 2001 et le 6 janvier 2002.

«La grande différence c'est qu'on se porte au secours de la Grèce, alors qu'en 2001 on poussait l'Argentine vers sa chute», estime M. De La Rua. L'ancien ministre de l'Economie Roberto Lavagna (2003-2005) estime en revanche que le FMI n'a pas tiré les leçons de la crise argentine. «Le FMI n'a rien appris et émet pour la Grèce les mêmes recommendations que pour l'Argentine en 2002, celles que nous avons rejetées».

«Loin d'être une organisation renovée, le FMI apparaît comme une institution qui insiste avec les mêmes vieilles recettes», déclare également l'actuel vice-ministre argentin de l'Economie, Roberto Feletti.

L'Argentine avait pu renouer avec la croissance dans la douleur, après une dévaluation de 65% de sa monnaie et l'explosion de la parité peso/dollar. De son côté, le filet de sécurité de la zone euro empêche la Grèce de faire faillite, mais aussi de dévaluer, la condamnant à l'austérité.