Les taux des emprunts d'État grecs et portugais ont continué de se tendre fortement jeudi, dans un marché obligataire européen toujours fébrile et déçu par les déclarations du président de la BCE, Jean-Claude Trichet.

À 14h, les rendements grecs à 10 ans grimpaient à 10,932%, contre 10,025% mercredi soir. Ils avaient atteint mercredi dernier leur niveau le plus haut depuis l'entrée de la Grèce dans la zone euro, à 11,142%.

Les taux grecs à deux ans continuaient de s'envoler à 15,901%, contre 14,420% la veille. Cela signifie que le marché juge élevé le risque d'une impossibilité pour la Grèce de rembourser ses emprunts à échéance deux ans, malgré le plan d'aide de 110 milliards d'euros apportés par l'Union européenne et le Fonds monétaire international.

«Au bout d'un moment, cela n'a plus de sens. La Grèce ne peut pas se refinancer sur les marchés car les taux qui lui seraient appliqués sont usuriers, a déclaré Laurent Geronimi, directeur de la gestion taux chez SwissLife Gestion Privée. Le marché est excessivement nerveux», a-t-il ajouté.

Les taux du Portugal, de l'Irlande, de l'Italie et de l'Espagne se tendaient également, bien que dans une moindre mesure que la Grèce, en raison des craintes de contagion de la crise grecque aux pays considérés comme les moins solvables de la zone euro.

La conférence de presse de la BCE n'a pas rassuré le marché obligataire.

Interrogé sur l'éventualité pour la BCE d'acheter des obligations d'État pour soutenir les pays qui ont des difficultés à se refinancer, le président de l'institution Jean-Claude Trichet a simplement rétorqué que l'option n'avait pas été discutée lors de la réunion, refusant catégoriquement d'en dire plus.

Il a sans surprise lancé de nouveau un appel aux gouvernements, afin qu'il prennent des «actions décisives» afin d'assainir durablement leurs finances publiques.

«La BCE n'envisage pas d'acheter des emprunts de pays de l'UE. C'est aux États de prendre des mesures pour mettre de l'ordre dans leurs finances», a souligné le directeur de la gestion taux de Swiss Life Gestion Privée. Les marchés s'attendent à des jours difficiles, avec une forte baisse de la consommation en Europe, a-t-il précisé.

Le rendement de l'obligation d'État portugaise à 10 ans augmentait à 6,091%, contre 5,762% la veille et l'espagnole à 4,407% contre 4,196%.

L'Espagne a pourtant passé jeudi un important test sur les marchés en parvenant à émettre des bons du trésor à un taux satisfaisant, compte tenu des inquiétudes des investisseurs sur les finances publiques du pays. Le Trésor a émis 2,345 milliards d'euros en bons du trésor à cinq ans, à un taux moyen de 3,532%.

Le taux est bien évidemment supérieur à celui de la dernière adjudication comparable, en mars dernier (2,81%), mais l'opération «s'est très bien passée», a noté Laurent Geronimi.

Le rendement de l'obligation d'État irlandais a augmenté jeudi de 22 points de base, à 5,775% contre 5,555% la veille au soir et l'italienne de 22 points de base à 4,274%.

Comme souvent en cas de fortes turbulences, les investisseurs privilégient les placements les plus «sûrs», des pays considérés comme les plus solvables, à savoir la France et surtout l'Allemagne.

Le rendement du Bund allemand à 10 ans a encore baissé à 2,775% contre 2,860% la veille à 18H00 et l'OAT française valait 3,120% contre 3,144%.

Le Gilt britannique était 3,792%, contre 3,815%.

Aux États-Unis, le rendement du bon du Trésor à 10 ans ressortait à 3,478%  contre 3,550% la veille au soir et celui du bon à 30 ans tombait à 4,321% contre 4,394%. Les taux américains à échéance courte étaient en recul à 0,12%, contre 0,15% mercredi.

Sur le marché interbancaire, l'Euribor à trois mois, l'un des principaux taux de référence du marché monétaire de la zone euro, est monté à 0,677% contre 0,672% mercredi, signe de la réticence accrue des établissements financiers à se prêter de l'argent entre eux.

Le taux interbancaire à trois mois offert à Londres, le Libor, exprimé en dollars, a pour sa part grimpé à 0,373% contre 0,360% mercredi.