La grève générale en Grèce contre le plan d'austérité draconien a dégénéré en violences qui ont fait au moins trois morts mercredi, renforçant l'inquiétude des Bourses mondiales qui chutaient sur fond de crainte d'une contagion de la crise.

Le président grec Carolos Papoulias a même averti que son pays était «au bord du gouffre» après ces violences meurtrières, survenues en marge d'une manifestation contre les mesures d'austérité, qui a rassemblé environ 30 000 personnes à Athènes selon la police, plus selon les organisateurs.

«Nous avons tous la responsabilité de ne pas faire le pas de trop, qui nous précipiterait dans le vide», ajouté le chef de l'État.

Des groupes de jeunes s'en sont pris aux forces de l'ordre et à des magasins et des banques du centre-ville. Un immeuble abritant une agence bancaire a été incendié à coups de cocktails molotov, coinçant une vingtaine de personnes à l'intérieur. Au moins trois d'entre elles, deux femmes et un homme, ont péri dans les flammes, a annoncé la police.

Deux bâtiments administratifs du centre d'Athènes ont également été incendiés, et des incidents ont aussi eu lieu à Salonique (Nord), deuxième ville du pays, où 20 000 personnes ont défilé, selon la police.

«Ce n'est que le début d'une grande guerre, lançait une manifestante, Hélène, bandeau rouge autour de la tête. Le gouvernement ne va pas reculer avec une seule journée de grève», a renchéri Jim Zach, comptable dans la fonction publique.

Le premier ministre Georges Papandréou a dénoncé un «brutal acte meurtrier», défendant une fois de plus les «décisions difficiles et responsables» prises «pour sauver le pays».

Les manifestations visaient à dénoncer le train de mesures - baisse de salaires et retraites, et hausses de taxes notamment - adopté par le gouvernement socialiste pour obtenir 110 milliards d'aide des seize pays de la zone euro (80 milliards) et du FMI (30 milliards) afin de sauver de la faillite le pays étranglé par une dette colossale.

Les députés belges ont à cet égard adopté mercredi un projet de loi qui autorise la Belgique à prendre part au plan européen d'aide à la Grèce, en prêtant environ un milliard d'euros la première année.

C'est dans ce contexte que le vice-président américain Joe Biden a quitté mercredi Washington pour l'Europe, où il doit prononcer un important discours à Bruxelles.

La situation grecque est surveillée de très près, car nombre d'autres pays, notamment dans la zone euro, ont laissé filer les déficits publics depuis 2008 pour faire face à la crise économique mondiale.

Les conséquences possibles des violences sur le plan de rigueur et la crainte persistante d'une contagion à d'autres pays européens plombait toujours les places financières, d'autant que l'agence de notation Moody's a annoncé mercredi qu'elle envisageait d'abaisser la note du Portugal.

La Bourse d'Athènes a plongé de 3,91%, celle de Madrid de 2,27%, l'Espagne étant considérée par les marchés comme le prochain maillon faible. Londres (-1,28%), Paris (-1,44%) ou Francfort (-0,81%) ont fait pâle figure, entraînant Wall Street qui a ouvert en baisse.

L'euro, lui, poursuivait sa descente aux enfers, sous les 1,29 pour un dollar, au plus bas depuis mars 2009.

Le premier ministre français François Fillon a toutefois assuré que «l'attaque spéculative» contre l'euro allait «échouer» et que la zone euro était «solide».

Quant au commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, il a voulu rassurer sur le sort de l'Espagne, affirmant que Madrid n'avait pas besoin d'une aide similaire à celle accordée la Grèce.

Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, a lui aussi écarté tout risque de «contagion», tout comme l'idée d'un éclatement de la zone euro.

Le chef du gouvernement socialiste espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a de son côté promis que Madrid respecterait «strictement» son plan de réduction des déficits publics à 3% du PIB en 2013, contre 11,2% actuellement.

Face à la tornade financière, de nombreuses voix ont appelé à davantage de discipline dans les pays de la zone euro.

La chancelière allemande Angela Merkel, qui a longtemps traîné des pieds sur l'aide à la Grèce, a ainsi demandé le renforcement du Pacte de stabilité de l'UE, censé notamment limiter les déficits publics, et plaidé pour une «procédure de défaut de paiement organisé» pour les États de la zone euro.

La Commission européenne s'est dite favorable à un tel «renforcement» et des réformes en ce sens devraient être discutées au sommet extraordinaire des dirigeants de la zone euro vendredi à Bruxelles.