Les messages rassurants du gouvernement espagnol n'auront pas eu raison des réserves des analystes de Standard & Poor's, qui a abaissé hier d'un cran la note de la dette du pays de AA» à AA.

L'agence de notation a expliqué sa décision dans un communiqué en relevant que la faiblesse de la reprise économique espagnole risquait de compromettre le rétablissement des finances publiques.«Nous estimons que la croissance réelle du PIB (produit intérieur brut) sera en moyenne de 0,7% par année sur 2010-2016, comparativement à une prévision antérieure supérieure à 1% par année», a-t-elle précisé.

Les deux autres agences de notation, Fitch et Moody, continuent pour leur part d'accorder leur note la plus élevée à la dette espagnole.

Bien que le pays demeure en bien meilleure situation que la Grèce, l'annonce de la décote a eu l'effet «d'une bombe» à la Bourse locale, relatent les médias locaux. L'indice IBEX a chuté fortement en fin de séance pour clôturer en baisse de 3%, comparativement à 4,2% la veille.

La vice-présidente du gouvernement, Maria Teresa Fernandez de la Vega, est encore une fois montée au front pour tenter de calmer les esprits.

«Nous adoptons toutes les mesures nécessaires pour réaliser nos promesses», a-t-elle souligné, en relevant que le pays avait déjà démontré qu'il «sait faire face aux difficultés» avec rigueur.

La veille, la politicienne s'était impatientée de voir que des agences de notation s'avisaient de mettre en question la solidité de l'économie espagnole.

Les mauvaises nouvelles relatives à l'évaluation de la dette surviennent alors que le gouvernement doit composer avec des résultats embarrassants sur le front de l'emploi, le taux de chômage excédant désormais officiellement 20%.

Vive critique

La vice-présidente espagnole n'est pas la seule à s'irriter de la décision de Standard&Poor's, puisque médias et économistes espagnols critiquent ouvertement le travail et le pouvoir des agences de notation.

«La question que beaucoup de monde se pose est de savoir comment ces entreprises ont pu accumuler autant d'influence», alors qu'elles ont «multiplié les erreurs» dans les mois précédant la crise financière de 2008, note avec irritation le quotidien El Pais.

En entrevue à La Presse, l'économiste José Antonio Herce, rattaché à une importante firme de consultants de la capitale, a déploré hier l'amalgame qui est fait entre l'Espagne et la Grèce.

«Il y a une association pas du tout judicieuse, presque subliminale», qui est faite entre les deux pays, déplore l'analyste, qui reproche aux marchés de confondre affinités culturelles et situation économique.

L'économie espagnole, précise M. Herce, est quatre fois plus importante que celle de la Grèce et largement plus diversifiée. Si le déficit peut sembler préoccupant, le poids de la dette par rapport au PIB, à moins de 55%, reste «l'un des plus bas de l'Union européenne», ajoute-t-il.

«Le risque de contagion par rapport à la Grèce reste très faible», assure le spécialiste.