Un métro. Des stationnements souterrains. Davantage d'artères piétonnières. Un centre des congrès digne d'une grande ville européenne. Une industrie touristique florissante. Quatre ans après l'extinction de la flamme olympique, le maire de Turin reste convaincu que les Jeux ont transformé à jamais l'économie de sa ville.

«Nous avons profité des Jeux pour moderniser la ville. Tout s'est fait en même temps: les Jeux, le métro, les stationnements souterrain et la piétonnisation des grands parcs. Ça a changé la perception que les Turinois avaient de leur ville», dit le maire Sergio Chiamparino en entrevue à La Presse Affaires, dans un excellent français.

Il faut dire qu'au moment où elle a obtenu les Jeux d'hiver de 2006, Turin cherchait déjà à s'éloigner de sa réputation de morne ville industrielle abritant le siège social du constructeur automobile Fiat. «Turin ne peut pas vivre sans l'industrie automobile, mais nous avons développé d'autres industries complémentaires avec les Jeux, comme le tourisme», dit le maire Chiamparino.

Selon le maire, l'entrée de Turin dans la grande famille olympique a permis d'attirer 43% davantage de touristes durant la période 2006-2009 comparativement aux quatre années précédant les Jeux.

Contrairement à Vancouver 2010 qui a dû se battre contre une crise du crédit et une récession, la manne olympique est arrivée juste au bon moment à Turin. C'est que le constructeur Fiat, plus grand employeur privé de la ville, a été obligé de réduire ses activités durant le cycle pré-olympique de Turin. «Les travaux olympiques ont permis d'amortir ce ralentissement, dit le maire Chiamparino. On parlait d'un métro à Turin depuis les années 70 et il a été réalisé en accéléré à cause des Jeux.»

Si belle soit-elle, la manne olympique n'a pas suffisamment profité aux entreprises turinoises, selon la professeure d'architecture Isabella Lami. «Les Jeux furent une occasion de donner du travail aux grandes entreprises de construction italiennes, mais pas aux PME de Turin qui n'avaient pas la taille pour profiter des contrats olympiques», dit la professeure d'évaluation économique à la Faculté d'architecture de l'Université de Turin, en entrevue à La Presse Affaires.

Quatre ans après les Jeux, le maire Chiamparino doit continuer de surveiller certains dossiers olympiques. «Certaines entreprises se disputent encore en cour pour être payées sur leurs contrats olympiques, dit-il. Il y a aussi des problèmes avec les pistes de bobsleigh et le tremplin du saut à ski. Ils sont difficiles à rentabiliser car peu de gens pratiquent ces sports en Italie. Tous les autres sites de compétition fonctionnent bien.»

Les Turinois ont dû être imaginatifs afin de rentabiliser certains de leurs équipements olympiques. À titre d'exemple, on ne joue plus au hockey sur l'une des deux patinoires du tournoi olympique de Turin, qui accueille plutôt des sports intérieurs (ex: basket) et des foires commerciales. «Nous avons réussi à utiliser les grands espaces urbains construits en prévision des Jeux, mais ce fut plus compliqué pour les sites de compétition, dit la professeure Isabella Lami. On parle encore de détruire certains sites à cause de leurs coûts d'entretien. Franchement, on se demande quoi faire. Nous avons essayé de développer des sports d'hiver, mais en Italie, le soccer est roi.»

Le plus grand legs des Jeux olympiques de Turin? Le métro vient immédiatement à l'esprit. «C'est inimaginable d'être une grande ville européenne et de ne pas avoir eu de métro auparavant», admet Isabella Lami.

Au métro, la professeure d'architecture préfère un autre legs, moins tangible celui-là: la confiance en soi. «Les Jeux ont créé une meilleure image de Turin, pour les gens de l'extérieur comme pour les Turinois, dit-elle. Les gens ici sont très réservés, très modestes et ils ont maintenant conscience qu'ils peuvent organiser des grands événements comme les Jeux olympiques.»