Comme d'habitude quand il rencontre des employés à l'étranger, Pierre Beaudoin, patron de Bombardier, prévoit une période de questions.

Mais on aurait pu entendre une mouche voler après sa présentation en novembre dernier devant ses employés indiens - Bombardier emploie désormais 1200 personnes en Inde. Au pays des castes, on n'a pas le droit d'interpeller le patron. «Ce sont des gens qui travaillent extrêmement fort, qui sont très organisés, mais plus gênés. C'est un autre style», explique John Paul MacDonald, vice-président principal de Bombardier. L'anecdote illustre bien les différences profondes entre les sociétés québécoise et indienne. Pour prospérer en Inde, les entreprises doivent toujours «être patientes, bien connaître leur clientèle et ses besoins», résume-t-il. «Ce n'est pas en venant ici deux ou trois fois par année comme en Chine, il faut établir des liens, des relations à plus long terme», explique-t-il.

Participer à une mission économique avec le premier ministre est fort utile, mais ne remplace pas des années de présence attentive. Avec les acquisitions faites dans le monde ferroviaire en Chine, Bombardier a prolongé ses racines de 35 ans. On a ouvert une usine à Savli, en Inde, en novembre 2008. Ses 1200 employés s'affairent à construire les 400 wagons et la signalisation du métro de Delhi, un contrat de 800 millions décroché par la firme montréalaise, devenue le plus important manufacturier de matériel ferroviaire au monde.

«En Chine comme en Inde, le marché est énorme. S'adapter au marché local, à ses particularités, est important», insiste-t-il.

L'Inde, qui veut construire une soixantaine d'aéroports, manque déjà de pilotes. Selon Nathalie Bourque, de CAE, il s'agit d'un marché rêvé pour son entreprise, qui produit des simulateurs de vol. En outre, la caution apportée par la présence d'un premier ministre «permet d'accélérer les choses», explique-t-elle.

Selon Simon Prévost, président des Manufacturiers et exportateurs du Québec, l'Inde reste, pour bien des gens d'affaires québécois, plus rassurante que la Chine ou d'autres pays émergents.

Ancienne colonie britannique, l'Inde a pu compter sur un système d'éducation solide qui a produit des chercheurs de pointe en informatique et en biologie, notamment.

«En partant, il y a 6% de la population, surtout chez les décideurs, qui parle anglais. C'est loin d'être le cas en Chine», résume-t-il. Le problème de la corruption est aussi bien moins présent que dans d'autres pays, en Russie notamment.